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Mots et images
Un extrait de ce très bon article d'alain Dubois sur le site suivant : http://www.toxicoquebec.com/actus/index.php?2005/01/24/210-la-tyrannie-du-nouvel-ordre-sexuel
Selon Xavier Deleu, «la littérature connaît une vogue intimiste-obscène». Pour Christian Authier «une nouvelle écriture féminine s'est emparée du sexe» (8). Ces produits n'ont pas nécessairement la prétention d'être érotiques ou pornographiques, mais relèvent, selon l'expression de Bertrand et de Baron-Carvais du porno parcellaire : les scènes pornographiques occupent une place d'importance variable, mais ne sont nécessairement pas le fil conducteur du récit. Le sexe y est traité de façon (hyper)réaliste. Est-ce là une stratégie relevant du simple racolage pour percer dans un marché saturé? Le fait est que jamais n'a-t-on été aussi proche de la description organique, qui est celle du X, où la chair est montrée de manière chirurgicale, voire gynécologique. De telles convergences ne sont pas fortuites : dans cette époque marquée par la marchandisation généralisée et la vénalité triomphante (9), dans cette ère de l'extimité, c'est-à-dire de l'intimité surexposée, il y a un souci de rendre acceptable et banale la représentation pornographique. À tout le moins, la frontière entre le X et le non X n'est plus très claire, la pornographie s'ébat de plus en plus, avec succès, hors de son ghetto, en proposant de nouvelles normes sexuelles de plus en plus extrêmes.
Aussi, des magazines destinés aux adolescentes, comme Vingt ans (dont le lectorat a en fait 16 ans), font écho à l'imagerie pornographique et la banalisent incroyablement. Un test dudit magazine range dans trois catégories les lectrices : « 1° La super extra-salope : «C'est bien, tu vas peut-être un peu loin, mais tu as de l'humour» ; 2° La salope normale : «Tu es fille de ton temps, moderne, c'est bien : tu as des aventures et un peu de sentiment, mais tu ne te laisserais pas avoir par ton mec s'il faisait la même chose» ; 3° La ringarde, le dinosaure présoixante-huitard comme il en existe encore, et dont se plaignent beaucoup les journalistes. » La journaliste du magazine féminin donne ses conseils. Et si la jeune fille n'entre pas dans les catégories prédéfinies majoritaires, c'est qu'elle est coincée. «C'est une plume prétendument très émancipatrice, mais qui en fait dicte des règles avec une éloquence putassière », commente Christian Authier (2001). Ce prosélytisme - car c'est de cela qu'il s'agit - est basé sur l'ordonnance de normes à suivre, lesdites normes étant étroitement liées à l'imagerie pornographique.
La pornographie n'est donc plus réservée aux ghettos des sex-shops et des salles spécialisées. Elle est désormais une industrie mondiale, massivement diffusée et totalement banalisée. En France, les chaînes hertziennes, câblées et par satellites proposent chaque mois 840 diffusions de films X (10). Par le câble ou le satellite, au Canada, les téléspectateurs ont accès à des dizaines de chaînes spécialisées dans la pornographie. Il existe même une chaîne canadienne d'informations en continu, Naked News, qui fait présenter l'actualité par des femmes et des hommes nus. Depuis l'arrivée massive des cassettes vidéo dans les années quatre-vingt, du téléphone rose et enfin de l'Internet, ce ne sont plus seulement les adultes qui consomment de la pornographie, mais également les adolescents, voire les pré-adolescents. Selon Denise Stagnara, la moitié des enfants français de 10-11 ans ont déjà vu un film X (11). Une enquête réalisée en 1998 en France auprès des lycéens révélait que «86 % avaient déjà regardé un film X». Dans de telles conditions, « quelles seront les valeurs et les références des enfants qui auront grandi dans une telle société ?», demande Christian Authier qui met en évidence l'apparition de nouvelles formes de délinquance en France * notamment les viols collectifs - et l'explosion du nombre des mineurs mis en examen pour des viols ou des agressions sexuelles (ainsi que l'augmentation parallèle du nombre de mineures victimes de ces agressions).
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