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La revue de presse

Samedi 2 avril 6 02 /04 /Avr 00:00

Le Texas veut bannir le sexe du cheerleading!!

Petit débat révélateur du puritanisme de certain dans les états du sud américains. Voir les articles sur la sodomie et les sodomie laws  pour plus d'info.
En effet, Les majorettes du Texas pourraient bientôt se voir interdire toute une série de mouvements trop suggestifs sexuellement, question de rendre le match du vendredi soir plus familial et de donner l’exemple aux adolescents. Le représentant de Houston, Al Edwars a présenté la semaine dernière un projet de loi visant à bannir les chorégraphies «sexuellement suggestives» des écoles primaires, secondaires et des collèges.

«La façon qu’elles ont de bouger, ce n’est pas danser ou faire le grand écart, elles font des choses sexuelles», a commenté M. Edwards. «Notre règlement dit que si ces mouvements ne disparaissent pas, nous coupons votre financement», a-t-il précisé. Selon le représentant du peuple, ces chorégraphies envoient un mauvais message aux jeunes. Le cheerleading est une immense industrie qui implique des millions d’étudiants américains des niveaux primaire, secondaire et collégial. Les compétitions commencent aussi tôt que la première année.

AgenceNews | 20 mars 2005

Samedi 26 mars 6 26 /03 /Mars 00:00

Voici un article qui se balade sur le net depuis environ une semaine instructif. Jetez un coup d'oeil aux marges!!

En  presque  un  an,  le  site de téléchargement VirginMega a écoulé 1,5 million de titres. Pour gagner de l'argent à terme, il espère revoir les    contrats de reversement avec les producteurs.                                                                                                        
                                                                            
La  route  est  longue  et  tortueuse  jusqu'à  l'eldorado supposé de la  musique en ligne. C'est l'enseignement de Virgin Megastore presque un an    après  avoir  lancé  la  deuxième version de son site de téléchargement,    VirginMega.  Principal  problème  :  le modèle économique. "Il n'est pas    viable,  tranche  Jean-Noël  Reinhardt,  le  président  du directoire de    Virgin   Megastore.  Nous  payons  0,16  euro  de  TVA,  0,70  euro  aux producteurs, 0,07 euro à la Sacem et 0,05 euro de frais de transaction." Pour  un  titre vendu 99 centimes d'euro, il ne reste donc que 1 centime d'euro  de  marge brute au détaillant, soit un peu plus de 1 %. "Dans le monde  physique, nous touchons une marge de 30 %. Nous avons donc engagé de  nouvelles  discussions avec les producteurs", a indiqué le président    du  directoire  qui espère faire baisser le montant des reversements. La Fnac  admet  aussi à mots couverts que le modèle n'est pas rentable mais    préfère  pour l'instant  insister  sur l'importance de se placer sur ce   marché émergent. 
                                                                            
Reste que les maisons de disques sont réticentes à l'idée de baisser les tarifs. "La structure de marge est équivalente entre les mondes physique et  virtuel", assure Jérôme Roger, le directeur géné- ral de l'Union des producteurs phonographiques français indépendants  (Upfi).  A  une différence  près : dans le commerce en ligne, c'est le distributeur qui paye  directement les droits à la Sacem alors qu'ils sont assumés par le producteur dans le monde physique. 
                                                                            
"Il  faudrait plutôt mener une réflexion sur le prix de vente d'un titre à  l'unité", oppose Jérôme Roger. De fait, le prix de 99 centimes est un standard qu'a imposé Apple au niveau mondial en lançant l'iTunes, et qui a obligé les plates-formes de musique à s'aligner. Au départ, VirginMega commercialisait  ses titres 1,19 euro. Faut-il augmenter les prix ? "Les    sonneries  sont  vendues  entre  deux et trois euros", précise Jean-Noël Reinhardt. Et le prix de vente des titres sur mobile a débuté à 2 euros.

Silicon.fr

Vendredi 25 mars 5 25 /03 /Mars 00:00

Les jeun's accros au porno ?

Un rapport du CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel) publié en novembre indique que 80 % des garçons et 45 % des filles entre 14 et 18 ans déclarent avoir vu au moins un film X dans les douze mois écoulés (1). Les garçons sont, sans surprise, davantage amateurs de ces images : un sur quatre en a vu plus de dix fois durant l'année. L'intérêt pour le sexe filmé augmente entre 14 et 15 ans : 67 % des garçons de 14 ans ont vu au moins une fois un film X dans l'année, contre 77 % à 15 ans. A ce même âge, ils sont 30 % à en avoir vu au moins dix dans l'année (ce que le CSA appelle les « spectateurs assidus ») alors qu'ils n'étaient « que » 18 % à 14 ans.

On trouve peu de « spectatrices assidues » : 2 % à 14 ans, 3 % à 15 ans. Le nombre de spectatrices occasionnelles est également sensiblement inférieur à celui des garçons : 36 % des filles de 14 ans ont vu au moins un film X durant l'année écoulée, contre 45 % à 15 ans. Il est intéressant de noter qu'après cette augmentation des chiffres entre 14 et 15 ans, les chercheurs ont observé une stabilité chez les garçons jusqu'à 18 ans et une légère baisse chez les filles.

« Ne soyez pas dupes ! »
Psychiatre de l'adolescence, Philippe Van Meerbeeck, sans diaboliser la pornographie, met en garde les jeunes qui la considèrent comme un « cours sur la sexualité ».

Que cherchent les adolescents dans la pornographie ?
Ils espèrent comprendre par des images - qui sont tout sauf pédagogiques - les mystères du sexe. Ils se découvrent un corps pubère, génitalisé et sont très intéressés par la question sexuelle. Ils veulent découvrir la sexualité de l'autre mais aussi entrer dans la sphère des parents. Ils cherchent à combler leur envie de connaissance comme ils peuvent, souvent les parents sont embarrassés d'en parler...

L'école devrait mieux comprendre cela et élargir la réflexion à autre chose que le sexe stricto sensu qu'on trouve dans la pornographie. En fait, les jeunes sont gravement désinformés. Il ne faut pas diaboliser la pornographie, les jeunes qui se masturbent devant une cassette, c'est d'une banalité confondante... Mais il faut être attentif à expliquer le côté manipulateur et tronqué de l'univers pornographique. Leur dire simplement : « Ne soyez pas dupes ! »

Est-ce que ça se traduit dans leur comportement sexuel ?
Il se passe des choses graves, c'est très inquiétant. On le voit avec le phénomène des « tournantes ». Il y a des jeunes filles qui pensent qu'elles sont anormales parce qu'elles ne font pas quatre fellations à des inconnus. Le danger de la pornographie, c'est qu'elle banalise des formes de sexualité partielles (fétichisme, homosexualité...). Cela peut bloquer dans une étape de découverte normale de sa sexualité. La pornographie mène par exemple à « instrumentaliser » l'autre dans la relation, ce qui est désastreux dans une relation affective. Parce que ce que les jeunes veulent, c'est aimer et être aimés.

Comment limiter ces effets négatifs ?
Il faudrait montrer aux jeunes comment les images qu'ils voient dans la pornographie sont manipulées, orchestrées. On y remplace les acteurs pour donner l'impression que le héros garde son érection pendant des heures, il n'y a pas de lien affectif entre les personnages, on voit des morceaux de corps, il y a des trucages... Les jeunes qui regardent de la pornographie pour s'informer voient quelque chose qui n'a rien à voir avec la sexualité dans la vie. Ils perdent leur innocence, mais dans une illusion... Le danger est là, quand ils voient un film X comme une vérité scientifique, comme « ce qu'il est normal de faire »

un article de Propos recueillis par M. D. de www.swarado.be

Plus: 

Nouvel Obs du 15 juin 2000 - H.S N°41 :http://www.nouvelobs.com/hs-lesados/se_chercher/art4.html

Mardi 8 mars 2 08 /03 /Mars 00:00

Paradoxe? Alors que les Français plébiscitent le bonheur familial, jamais la question de la liberté sexuelle au sein du couple ne s'est tant posée. Homme ou femme, chacun, aujourd'hui, réinvente à sa manière les règles du jeu. Entre aventure et déchirure, transparence et secret

Mener deux, trois vies à la fois? «Un jeu d'enfant!» souffle Paul. Il avale son petit noir, à la table d'un café, et s'amuse à l'idée de dévoiler son odyssée sentimentale. «J'ai toujours été infidèle, lâche-t-il. J'ai rencontré ma femme à 22 ans et, avant même qu'on vive sous le même toit, je l'ai trompée.» Ce butineur hédoniste, âgé de 48 ans, aux cheveux poivre et sel, a longtemps pratiqué une «drague de cueillette plutôt que de culture». Transporté par le désir, il gratifie ses maîtresses d'un «chérie», pour ne pas se tromper de prénom, et, s'il peut les cueillir au travail, il ne s'en prive pas. Son plaisir, c'est la chasse, la conquête. «Ce moment d'une grâce inouïe, poursuit-il, qui fait basculer la femme de la réserve à l'abandon.» Une proie de choix, l'épouse. «La femme mariée, deux enfants, 35 ans, est intéressante parce qu'elle ne veut pas d'emmerdes, dit-il, et recherche des frissons qu'elle ne connaît plus.»

Claustrophobie conjugale
Poussé par une forme d'absolu, de boulimie existentielle, mâtinée de peur de la solitude, Paul se dit tiraillé entre la jouissance de la conquête et la conscience de son non-sens moral. Ce don Juan cherche à prolonger la fête, mais surfe sur l'abîme. Il confie: «On se dit que ce n'est pas bien, mais on le fait quand même.» On aime sa moitié, sa vie, ses enfants, mais on fuit la claustrophobie conjugale. On rêve d'exclusivité, mais on exalte une sexualité fraîche et vagabonde. On navigue à vue entre deux hypocrisies: le tout-interdit et le tout-permis. La fidélité n'est plus ce tabou qui déchirait les consciences, flétrissait l'honneur conjugal: 39% des hommes - contre 24% des femmes - confient avoir déjà trompé leur conjointe, selon un sondage Ifop réalisé en 2000. En 1972, elles étaient trois fois moins nombreuses que les hommes. «Elastiques avec leur engagement initial, les Français se montrent de plus en plus pragmatiques, notent Pascale Wattier et Olivier Picard, auteurs de l'ouvrage Mariage, sexe et tradition (Plon). Ils défendent le droit de chaque couple à redéfinir sa liberté conjugale dans un subtil dosage entre secret et transparence.» Prendre un amant n'est plus un sacrilège ni un scandale. «C'est devenu une injonction dans les magazines féminins - «Profitez des vacances sans votre jules!» - relève le psychiatre Jacques-Antoine Malarewicz, spécialiste du couple. Il y a une forte pression sociale: soyez mince, séduisant et épanoui sexuellement. Si leur mari les délaisse, les femmes n'hésitent plus à tenter l'aventure.»

D'ailleurs, cela fait longtemps qu'on ne dit plus «adultère» ni «flagrant délit» au sujet des frasques extraconjugales. «Considéré comme un crime sous l'Ancien Régime, puis un délit jusqu'en 1975, l'adultère n'est plus puni, et devient aujourd'hui une affaire strictement privée», raconte l'historienne Sabine Melchior-Bonnet, qui a publié avec Aude de Tocqueville une passionnante Histoire de l'adultère (La Martinière). Les aventuriers de la double, voire de la triple, vie préfèrent enguirlander d'expressions bucoliques le spectre du péché et balayer les peurs religieuses qui jadis s'y adossaient: ils chantent les louanges du désir nomade et des escapades voluptueuses. «Bien sûr, la fidélité demeure pour le couple une valeur sacrée. On y croit, on s'y attelle, mais on cède plus facilement, explique la philosophe Patricia Delahaie, qui a recueilli le témoignage d'une quarantaine de femmes dans son livre Fidèle, pas fidèle? (Leduc.s). L'une d'elles m'a lancé: «Un amant, c'est du développement personnel, et cela coûte moins cher qu'un psy!» Par les émotions, les remaniements personnels qu'elle entraîne, l'infidélité reste un bouleversement qui peut causer autant de bonheur que de dégâts irréparables.»

Un CDD amoureux
C'est le paradoxe: les Français rêvent de constance sentimentale - voir L'Express du 21 juin 2004 sur la nouvelle passion du mariage - mais l'air du temps flirte avec la frivolité. En France, 800 000 internautes draguent sur le Web, selon une étude NetValue. Et les frasques des nymphettes et des mâles testostéronés lâchés sur L'Ile de la tentation attirent chaque été sur TF 1 près de 3 millions de téléspectateurs qui n'attendent qu'une chose: que les couples craquent! Où commence et où s'arrête la fidélité? Au lit conjugal, érigé en interdit absolu par l'écrivain Catherine Millet, qui détaille sa vie sexuelle, mais refuse d'y aligner ses amants? Au geste érotique - «Boire un Gini, c'est tromper?» demande la publicité, ces jours-ci? A une philosophie hédoniste - «On est fidèle quand on tient les engagements que l'on a choisis», déclinée par Michel Onfray dans sa libertine Théorie du corps amoureux (Grasset)?

A l'heure où le couple s'avère aussi précaire qu'un CDD amoureux, où l'on papillonne avant de s'installer, où 1 mariage sur 3 vire au fiasco, chacun insuffle un sens très personnel à l'infidélité. Est-elle la violation d'un serment social, religieux, sacré? Un petit caprice sans lendemain qui ne fait de mal à personne ou bien un coup de canif définitif dans le contrat conjugal? Socialement toléré, individuellement insupportable, l'adultère du XXIe siècle incarne désormais l'expression d'une liberté mais peut entraîner une réaction radicale chez celui qui le subit (lire l'interview d'Isabelle Adjani). Il reste d'ailleurs le motif n° 1 de divorce. «Celui qui est trahi ne dort plus, maigrit, rumine ses reproches, explique la psy Mireille Bonierbale, qui dirige l'enseignement de sexologie à la faculté de médecine de Montpellier-Marseille. Personne n'en sort indemne: il y a presque toujours une victime et peu de conjoints trahissent sans culpabilité. Le «trompé» se sent foudroyé par une blessure narcissique - «Je ne suis plus rien, puisque je ne suis rien pour toi»».

En ce moment, François, 40 ans, avocat, jongle entre trois téléphones portables, un double agenda et... quatre femmes. Et de préciser: «Epouse non comprise.» Oui, il est marié. Depuis dix ans. Mais elles aussi le sont - trois d'entre elles. Elles ne vivent pas à Paris, ça aide. Il a toujours été infidèle, ça entraîne: «Mon épouse passe avant les autres, mais j'ai des sentiments pour toutes.» Il reste, il teste. Son angoisse, c'est la routine. Un classique. Alors que, autrefois, les conjoints infidèles invoquaient la fatalité, ils assument aujourd'hui leur inconstance. Leurs raisons sont multiples: l'ennui, le coup de foudre, le plaisir de la transgression, le goût de la vengeance, etc. Leur passage à l'acte se prépare longtemps à l'avance, sur le terrain inconscient des rêves, des fantasmes, des frustrations. «On trouve aussi bien les dons Juans, qui exercent la séduction comme un sport, que ceux qui font une incartade pour tester la force de leur couple», souligne Paule Salomon, psychothérapeute et auteur de Bienheureuse Infidélité (Albin Michel). Tous les psys le disent, en matière d'adultère, la nouveauté est que les femmes sont en train de rattraper les hommes, mais les uns et les autres ne se lancent pas avec les mêmes besoins dans la parade. «Les hommes, eux, se rassurent sur leurs performances sexuelles. C'est le fantasme de la madone et de la putain: d'un côté, la femme légitime, qu'ils aiment; de l'autre, la maîtresse, précise le Dr François Parpaix, sexologue, qui a publié Pour être de meilleurs amants (Robert Laffont). Les femmes, elles, cherchent autant le plaisir charnel qu'une écoute, un regard attentif.»

Il lui a plu, elle y est allée
Dans le précipité de son débit perle un sentiment d'exaltation et de... honte, vite ravalée. Mariée depuis dix ans, Sophie, jolie blonde employée de banque, 36 ans, trois enfants, a trompé son mari pour la première fois il y a trois mois. Un soir de plus, un de trop, il est resté au travail. Elle sort avec des amies. Un type l'invite à danser la salsa. «Brun, bronzé, élancé, il dégageait une attraction animale, dit-elle. Il m'a fait valser toute la nuit. Jusqu'à ce que j'en perde la tête.» Elle baisse d'un ton. «Quand j'ai senti ses mains sur ma peau, j'ai su que ni mon mari ni mes enfants ne m'empêcheraient d'aller jusqu'au bout.» Sophie ajoute que, cette nuit-là, elle a rajeuni de dix ans. Puis elle a rendossé sa panoplie d'épouse. «Quand j'y pense, j'ai envie de pleurer, avoue-t-elle. Je lui ai interdit de me rappeler. Mais je n'ai qu'une envie, le revoir...»

Jamais la question de la liberté sexuelle au sein du couple, en particulier le couple marié, ne s'est posée avec autant de vigueur. En vingt-cinq ans, tous les vieux verrous répressifs ont été balayés: la réforme du divorce en 1975, le droit à la contraception, la montée de l'individualisme ont changé les règles du jeu conjugal. Désacralisé, le mariage ne corsète plus le désir, pas plus que l'entrée dans la vie sexuelle et la procréation - 40% des enfants naissent hors mariage. «Dès lors que cette institution n'agit plus comme garde-fou, la satisfaction de nos désirs prime sur cet effort du renoncement, explique Sylvain Mimoun, andrologue à l'hôpital Cochin, à Paris. L'infidélité a toujours existé - il n'y a qu'à voir les pièces de Feydeau: les hommes avaient une femme et une maîtresse. C'était organisé. Aujourd'hui, on agit plutôt par impulsion, on consomme de l'amour, a fortiori du sexe: elle me plaît, j'y vais.» Il lui a plu, elle y est allée. Dix mois, dix petits mois après avoir juré fidélité devant M. le Maire, Cindy, 26 ans, s'est jetée dans les bras d'un ami. Son chavirement affectif n'est qu'une suite de promesses non tenues, de digues morales rompues: ne pas succomber, ne pas trahir, ne pas s'attacher, etc. «J'ai lutté de toutes mes forces, mais je me sentais si seule! dit-elle. Mon amant a comblé mes désirs, mes angoisses. C'est une bouffée d'oxygène. Mon mari est accaparé par son travail, mais je ne veux pas le quitter. Alors je le trompe...»

L'amant(e) comme dopant(e) du mariage? Faire ménage à trois serait le seul moyen de réveiller sa vie à deux. Aussi efficace que le Viagra, l'escapade sexuelle aurait des vertus thérapeutiques sur la libido conjugale. «Le trompeur a l'impression de rajeunir de vingt ans, mincit, fait des rêves érotiques, retrouve une dynamique sexuelle, assure le Dr François Parpaix. Mais l'adultère ne résout pas les problèmes du couple. Il reste l'indicateur de l'usure conjugale.» Effrayés par la perspective vertigineuse d'une vie conjugale extensible, les Français veulent tout: le piment de l'interdit et le cocon familial, le confort et l'érotisme. Les couples qui se marient aujourd'hui passeront en moyenne quarante ans ensemble, avec l'allongement de l'espérance de vie - 75 ans pour les hommes et 82 pour les femmes. «Le couple des années 1950 et 1960 était fusionnel et romantique; celui de demain sera fissionnel, avance Serge Chaumier, sociologue et maître de conférences à l'université de Bourgogne. Chacun définit son contrat, ce qui est permis ou non: danser, flirter, coucher... Délestée du poids de la morale judéo-chrétienne, la fidélité n'est plus charnelle, mais se recompose sous une forme plus laïque, spirituelle. Grâce aux progrès de la contraception, on dissocie la sexualité de la procréation. Et c'est une révolution.»

   
Le sang souillé
Durant des siècles, l'infidélité du mari n'a pas pesé lourd, alors que la trahison de l'épouse lui valait l'opprobre. La raison officielle: elle brouillait la filiation. L'origine du mot «adultère», du latin adulterium, est d'ailleurs «altération», au sens où le sang est souillé. «L'histoire de l'adultère pourrait se confondre avec une histoire de la femme vue à travers le prisme masculin: lascive, inconstante, dangereuse et criminelle, relève Sabine Melchior-Bonnet. Jusqu'à l'époque contemporaine, la bâtardise était un péché. D'ailleurs, ces enfants n'ont obtenu un statut égal à celui des enfants légitimes qu'en 1972.»

Mais il y a une raison moins noble: la femme est la propriété de l'homme. Dans la Grèce antique, le législateur n'y va pas par quatre chemins, permettant à l'offensé - père, frère ou mari - qui surprend un adultère de tuer l'offenseur. Rien de moins. «Puis, avec les Romains, le droit civil s'empare de la notion d'adultère, poursuit l'historienne. Et c'est ce droit, remanié par les empereurs chrétiens, que la France observe jusqu'à la Révolution de 1789.» Les mœurs sont plus que débridées, à Rome, quand l'empereur Auguste édicte sa fameuse Lex Julia de adulteris. Beaucoup de citoyens vivent avec une esclave qu'ils affranchissent: des brassées d'enfants illégitimes naissent de ces unions. Divorces et répudiations vont bon train. Où finit le mariage? Où commence l'adultère? On ne sait plus très bien. Auguste décide alors de restaurer la dignité du mariage: l'adultère tourne à l'offense criminelle. Et discrimine la femme, coupable si elle a des relations sexuelles avec un autre, tandis que son mari l'est seulement si la femme qu'il a débauchée est mariée. Il est tenu de la traduire devant un tribunal et de la répudier, sous peine d'être accusé de proxénétisme. Et à partir du code de l'empereur Justinien, la peine de mort pour la coupable est remplacée par le fouet et la réclusion dans un monastère.

Des sérails de favorites
Durant des siècles, en France, l'adultère est sévèrement corseté par deux discours normatifs: le juridique et le religieux. «La fidélité a la même racine que foi, fides (confiance, en français), explique Odon Vallet, historien des religions. Dans la fidélité, ce qu'il y a de judéo-chrétien, c'est l'alliance entre un homme et une femme qui reflète l'alliance entre Dieu et l'humanité. Il y a ainsi une sacralisation de la fidélité et du mariage.» L'adultère ne se contente donc plus de saper l'ordre social; il passe aussi pour un sacrilège. Le message chrétien impose une vision du mariage, monogame, indissoluble, et condamne les amours parjures. Un des dix commandements donnés par Dieu à Moïse stipule: «Tu ne commettras pas d'adultère.»

La pastorale ecclésiastique s'attache peu à peu à infléchir les mentalités. Lourde tâche, face aux mœurs exaltées des seigneurs mérovingiens et carolingiens! Le roi Dagobert, pas si bon que ça, vit avec trois reines; Charlemagne, fieffé séducteur, n'est pas en reste. Pour autant, les pratiques illicites ne s'évanouissent pas. L'adultère se coule dans le secret des alcôves et des confessionnaux. Vanité des puissants: les rois entretiennent des sérails nantis en favorites, d'Henri IV et sa volage épouse, Margot, à Louis XIV et la Montespan, à Louis XV et la Pompadour...

Du côté de la justice, les recours diminuent au fil des siècles, au profit des séparations amiables. Il n'y a guère que la loi pour ne pas répercuter l'évolution des esprits et maintenir la supériorité de l'homme sur la femme. Elaboré pour revaloriser le mariage, malmené par la Révolution, le Code Napoléon, le fameux Code civil, affirme en 1804 que les époux se doivent fidélité mutuelle. L'homme est libre d'assouvir ses caprices tant qu'il est hors de la maison, sinon il risque une amende. La femme, elle, est passible de trois mois à deux ans de prison. L'adultère est donc une infraction punie par le Code pénal, jusqu'en 1975. «Depuis cette date, les femmes n'ont plus peur d'être répudiées, peur d'être enceintes, peur du qu'en-dira-t-on, explique le Dr Gérard Leleu, sexologue. Aujourd'hui, elles ont conquis les mêmes droits que les hommes: le droit de travailler, de voter et le droit au plaisir. Le sexe a pris le pouvoir, dans le couple.»

Au point que les duos les plus soudés ne peuvent jurer qu'ils ne céderont pas un jour à la tentation. Les ami(e) s, les collègues sont les partenaires extraconjugaux les plus fréquents, loin devant l'inconnu et les rencontres de vacances. Mais le danger, c'est d'être reconnu, piégé. Les athlètes de la gymnastique affective n'ont pas le droit à l'erreur. Ils sont comme des funambules, toujours sur la corde raide. Le secret impose un rituel: une RTT tous les quinze jours, par exemple, pour Mathieu. Cet ingénieur de 36 ans a entamé une liaison, il y a un an, après la naissance de son premier enfant. Elle a duré huit mois. Sa maîtresse choisissait le restaurant, lui l'hôtel. «Chacun écrivait deux fantasmes sur un papier, dit-il. Nous avions décidé que lorsque nous les aurions tous réalisés, nous arrêterions.» Ils se sont pliés aux règles du jeu et ne se voient plus. «Mon épouse ne sait rien de la double vie que j'ai menée. Je n'ai pas de regrets, parce qu'elle n'a pas eu à souffrir de mes écarts.»

Et, pour se décomplexer un peu plus, les stakhanovistes de la séduction en appellent à la biologie. Docteur en neurosciences, Lucy Vincent s'est penchée sur l'alchimie de nos inclinations, ce phénomène irrésistible qui pousse deux personnes l'une vers l'autre. Elle en a tiré un ouvrage instructif, Comment devient-on amoureux? (Odile Jacob). Le coup de foudre? Avant tout beaucoup de chimie et un zeste de cognitif! Un cocktail de phéromones, d'odeurs et de messages inconscients! «Il agirait sur nous comme une sorte de piège biologique, qui nous mettrait sous pression, explique-t-elle, dans un état aussi incontrôlable que délicieux pour nous forcer à accomplir notre destin génétique.» C'est un organe situé sous le palais qui détecterait dans l'air les fameuses phéromones. Et nous voici envahis par une libération d'ocytocine, la fameuse hormone de l'attachement sécrétée lors des rapports sexuels. En un mot, irrésistiblement attirés. Mais la passion ne dure pas. On observe, après un certain nombre de rencontres, un tassement de l'effet. Après de dix-huit à trente-six mois - le temps de faire un enfant et de l'élever! - voici la routine. Devient-on plus sensible à l'infidélité passé la période rose? «Sans doute», répond Lucy Vincent. Si près de 40% des divorces sont prononcés après dix ans de mariage, le premier pic survient au bout de cinq ans seulement.

Le dire ou le taire?
Des maris trompés et des femmes éplorées, l'avocate Sylvie Cohen-Solal en reçoit depuis quinze ans, dans son cabinet parisien. «L'adultère reste la faute la plus invoquée, explique-t-elle. Et ce sont les femmes, à 88%, qui demandent le divorce. Il y a deux sortes d'infidélité: l'accident de parcours et la liaison installée. Ce sont plutôt des hommes, âgés de 40 à 50 ans, qui mènent cette double vie. C'est la résidence alternée: la semaine chez la femme, le week-end chez la maîtresse!» A 30 ans, Isabelle était abonnée au week-end. C'était elle, la clandestine. Elle a vécu sept ans en pointillé avec un homme marié dont la femme vivait en province. Le jour où elle a voulu un enfant, il a hurlé. Elle l'a quitté. «J'ai eu droit aux promesses, aux insultes, aux menaces, dit-elle. Il a tout tenté pour me récupérer.» Une scène classique, selon le psychiatre Patrick Lemoine, chef de service à l'hôpital du Vinatier, à Lyon, auteur de Séduire (Robert Laffont). «Le véritable Casanova ne désire pas de femme, il veut juste en être désiré, précise-t-il. Séduire, c'est ravir, enlever, séquestrer, en aucun cas aimer. Anxieux sur ses capacités à être aimé, il ne se met jamais à la place de l'autre.»

A condition que l'incartade soit passagère, ou accidentelle, on lui survit plutôt mieux qu'auparavant. On sait qu'elle peut arriver. Mais faut-il le dire ou le taire? A la longue, les ruses, la peur de se faire piéger finissent par créer chez l'époux volage une tension insupportable: l'aveu est alors précipité. Il sépare plus qu'il ne répare. Thérapeute de couples, le psychanalyste Robert Neuburger met en garde contre ce culte de la transparence: «Cette confession provoque un drame qui laisse des traces indélébiles. Elle met le doigt sur une transgression du contrat de confiance que s'est donné le couple. Certains, suivis en thérapie, arrivent à se remettre en question, pour en tirer une expérience positive.»

Très tôt, Françoise Simpère, une brune séduisante, mère de deux ados, a choisi de le dire. Elle a des aventures. Et son mari le sait. Onze mois après leur union, il y a trente ans, Françoise a rencontré un homme avec qui elle entretient toujours des relations. Par la suite, avec chaque homme de sa vie, cette Parisienne a tissé des liens «affectifs et amicaux pour certains, confie-t-elle, passionnels ou seulement sensuels pour d'autres, ou tout cela la fois, liens qui évoluent au gré des envies: rien n'est fixé». De ses petits arrangements avec la fidélité elle a tiré un essai: Il n'est jamais trop tard pour aimer plusieurs hommes (La Martinière). Persuadée que «l'amour unique est un mythe», elle organise sa vie entre la maison familiale et son studio: «Je reste discrète, je n'ai pas une vie débridée. J'aime mon mari et tous les hommes de ma vie. Les relations de courte durée ne m'intéressent pas.» Elle ne se dit pas infidèle, mais polyamoureuse. S'agit-il encore de fidélité? Les polyfidélités, les polyamours et autres polygamies à la chaîne, via les unions successives, rendent aujourd'hui plus flous les contours de l'infidélité, et poussent plus que jamais chaque couple à réinventer ses propres règles du je(u).

L'Express - Marie Huret, Delphine Saubaber

Dimanche 6 mars 7 06 /03 /Mars 00:00

 «Clients, vous jouez à la roulette russe ?»  Une excellente initiative !!!

 Une association lilloise d'aide aux prostituées a lancé une campagne d'affichage sur les bus de la ville pour mettre en garde les clients de la prostitution contre les rapports sexuels sans préservatif et participer à la lutte contre le sida.

  «Clients, vous jouez à la roulette russe ?»  Est l'un des slogans pour mettre en garde les clients de la prostitution contre les rapports sexuels sans préservatif et participer à la lutte contre le sida.

Depuis mardi et pendant une semaine, certains bus lillois arborent sur leurs flancs en grosses lettres rouges sur fond blanc: "Clients, le port du préservatif ne se marchande pas!". Des dessins humoristiques accompagnent le slogan.

La campagne publicitaire se décline en deux autres slogans et en plaquettes d'information distribuées par les prostituées à leurs clients. Elle est financée par la délégation sida de la Direction départementale des affaires sociales.

 

 

 

 

 

Jeudi 3 mars 4 03 /03 /Mars 00:00

Suite de nos infos du tour du monde.

En plein délire nationaliste, le Président a décidé d'imposer les beautés locales dans les pubs, les défilés... Sous prétexte de protéger la «moitié faible de la société» et de stopper le trafic de femmes, les agences de mannequins sont harcelées, les affiches de «crasseuses» étrangères décrochées. Et Loukachenko n'entend pas s'arrêter au pied des podiums.

Est-ce que vous auriez des visages biélorusses ?», «Nous avons besoin de types bien biélorusses... Vous savez pourquoi.» Dans les agences de mannequins de Minsk, c'est la nouvelle question à la mode. «Moi-même, je serais bien en peine de définir ce qu'est une Biélorusse type», sourit la directrice d'une petite agence de modèles (1). «Mais bon, je vois ce qu'ils veulent dire», confie-t-elle, en feuilletant ses catalogues. La coquine au regard noir, par exemple : «Ce n'est pas la peine, explique la professionnelle. Elle peut bien marcher en France ou ailleurs, mais chez nous, terminé. Elle fait trop occidentale.» De longs cheveux clairs et lisses, des pommettes hautes et un air de poussin tout juste tombé du nid, en revanche : «Oui, elle, je la présente quand on me demande le type biélorusse. Elle passe bien ici.»

La préservation des «filles biélorusses» est la dernière lubie du dictateur national, Alexandre Loukachenko, 50 ans, au pouvoir depuis 1994. Après avoir rêvé de reconstituer une union quasi soviétique avec la Russie, le despote s'est ensuite lancé dans une nouvelle chimère nationaliste : l'objectif est maintenant l'autosuffisance nationale et le rejet des influences perverses de l'Occident.

Sur la route du palais

Dans une des tirades dont il est coutumier, en novembre dernier, le Président s'est ainsi échauffé contre ces «Françaises au visage crasseux» qui le contemplaient du haut de leurs affiches sur la route de son palais. «Nous devons défendre la moitié la plus faible de notre société. La Biélorussie est l'un des quelques Etats au monde qui peuvent être fiers de compter un grand nombre de belles femmes», argumentait un peu plus tard le Président, enjoignant les publicitaires du pays à recourir davantage à ces beautés locales plutôt qu'à des étrangères. La tirade contre les «Françaises au visage crasseux» a fait une victime immédiate, pas très française : Cindy Crawford, qui posait pour une marque de montres suisses sur la route du Président, a été décrochée. «Rien n'interdit encore d'utiliser des mannequins étrangers, soupire le directeur d'une agence de publicité à Minsk. Mais on nous a prévenus qu'un décret est en préparation. Et d'ici là c'est la loi du téléphone qui prévaut : il suffit qu'un fonctionnaire passe un coup de fil, et on enlève ce qui pourrait déplaire au Président.»

Officiellement, l'offensive contre les «crasseuses» poursuit bien sûr un noble but : il s'agirait de donner du travail aux modèles biélorusses pour les dissuader de partir à l'étranger, où elles risquent de tomber dans de mauvaises mains. L'attaque s'est d'ailleurs accompagnée, ces derniers mois, de raids contre les agences, soudain soupçonnées de servir de couverture à la prostitution. Une première agence de mannequins, Zara, installée au siège de l'entreprise pétrolière russe Lukoil et qui de fait, selon plusieurs témoignages, aurait servi à approvisionner les oligarques en jolies femmes, a été fermée. «Des centaines de filles ont été interrogées, raconte un ancien mannequin. Mais aucune n'a avoué !» Prise en flagrant délit de franchissement de frontière avec plusieurs filles et des liasses de dollars non déclarés, la directrice de Zara a été condamnée à deux ans et demi de prison pour «contrebande».

«Il faut comprendre les filles, plaide une autre directrice d'agence, ancien modèle elle-même. Pour un défilé de mode, c'est-à-dire le casting puis deux ou trois séances de répétition où elles doivent arriver impeccables, joliment habillées, maquillées et manucurées, nous payons 20 ou 30 dollars au mieux. Quand un oligarque leur propose un week-end à Moscou, ou une semaine de repos aux Emirats, qui leur permettent de s'offrir ensuite un téléphone, une voiture ou un appartement, la tentation est énorme !» «Le problème est bien réel, confirme Iouri Fedorov, directeur d'un projet de lutte contre le trafic des femmes biélorusses financé par l'ONU et l'Union européenne. Selon nos estimations, près d'un millier de filles biélorusses partent ainsi tous les ans de gré ou de force à l'étranger pour être livrées à la prostitution. Et, de fait, il semble clair que certaines soi-disant agences de modèles à Minsk servaient de couverture à ce trafic.»

Entre des mains agréées

Rien ne dit pourtant que les raids lancés ces derniers mois mènent vraiment à l'arrestation des principaux trafiquants et non plutôt à une réorganisation du marché entre quelques mains agréées. «Même si on fait quelques affichages de plus avec des filles biélorusses, je ne sais pas si cela les aidera beaucoup, objecte un publicitaire. Actuellement, le tarif pour l'utilisation de l'image d'une fille dans toute la Biélorussie, c'est 100 dollars, pas plus. Et tant que tout est fait dans ce pays pour décourager les investissements étrangers, je ne suis pas sûr que ces tarifs augmenteront beaucoup.» Les trafics de femmes sont-ils d'ailleurs possibles sans la complicité des fonctionnaires ? Et peut-on avoir quelques informations sur les enquêtes en cours ? Lorsque l'on pose ces questions à Alexandre Soldatenko, responsable de la lutte contre le commerce des êtres humains à la police biélorusse, l'homme, qui s'efforçait jusqu'alors de se montrer sympathique, explose : «Je le savais ! On vous a commandé cet article ! Vous êtes payée. Vous voulez dire que la Biélorussie est un Etat totalitaire ! Est-ce que vous ne vous promenez pas librement à Minsk ?» Le Français Patrick Bourdon, qui avait tenté d'ouvrir en Biélorussie une succursale de l'agence Metropolitan, pourrait aussi témoigner de l'absurdité des contrôles subis ces derniers mois. A force d'interrogatoires et d'insinuations, il a fini par céder et décidé de fermer son agence, qui avait pourtant déjà décroché quelques contrats en France pour des jeunes femmes biélorusses. «Tous nos mannequins, mon épouse et moi-même avons été interrogés. Rien d'anormal n'a été trouvé, tout était en règle, mais on m'a fait comprendre qu'il fallait mieux que j'arrête», raconte ce petit entrepreneur, installé depuis dix ans en Biélorussie.

«Tout ce qu'il faut ici»

«Lapinette, redresse-toi !», «Toi, tu marches comme un mammouth !», «Et toi là-bas, il faut maigrir !» : bombant le torse parmi ses élèves, ce soir-là une cinquantaine d'apprentis mannequins âgés de 5 à 20 ans, Sacha Varlamov est l'un des rares dans le petit monde de la mode biélorusse que l'on sent heureux de cette «remise en ordre». «Je comprends que notre Président ait envie de voir nos filles dans notre pays. Pourquoi afficher Claudia Schiffer si l'on a tout ce qu'il faut ici ? Grâce aux mesures prises maintenant pour soutenir la mode biélorusse, donnez-nous encore cinq ans, et nous nous mesurerons à Paris !» promet-il. La star de la mode biélorusse, formée sur les podiums de l'époque soviétique, s'est lui-même fait promettre par Loukachenko la direction d'un futur centre de la mode nationale, qui sera situé dans la bibliothèque nationale, en forme de diamant, actuellement en construction à la sortie de Minsk.

Dans ce pays d'Ubu qu'est devenue la Biélorussie de Loukachenko, ce qui arrive aux mannequins n'a rien d'exceptionnel. Depuis le 1er janvier, le combat du Président pour l'identité biélorusse passe aussi par des quotas de 75 % de musique nationale que doivent diffuser toutes les radios du pays. «Nous avions un peu peur que cela soit difficile à tenir et que les auditeurs et annonceurs se détournent de nous, avoue Alexei Nabeïev, directeur musical de la radio FM Unistar BDU, qui a déjà reçu un avertissement pour non respect du quota. Mais grâce à cette mesure les musiciens biélorusses viennent maintenant nous voir et proposent leurs disques. C'est un préjugé de croire que les groupes biélorusses sont moins bons que les autres.» Là encore, la mesure est d'autant plus aberrante qu'au même moment une demi-douzaine de groupes du pays, comme NRM, Palats ou Drum Ecstasy, qui ont eu l'audace de participer à un concert anti-Loukachenko, sont interdits d'antenne. «Il n'y a pas d'ordre écrit, soupire Lavon Volski, le chanteur du groupe NRM. Mais là aussi, c'est le droit du téléphone qui prévaut. Les radios savent qu'elles ne doivent pas nous diffuser si elles ne veulent pas perdre leur licence.» Depuis longtemps déjà, Lavon Volski ne passe plus à la télévision biélorusse, mais quelques concerts sont encore possibles et les ventes de ses disques se sont multipliées par dix depuis l'introduction des nouveaux quotas . «C'est bon pour nous, les gens éteignent la radio et achètent nos disques», se console-t-il, drapé dans une écharpe orange, symbole de la révolution démocratique qui vient de triompher dans l'Ukraine voisine.

Recroquevillée derrière une armoire, qui bloque le dernier réduit de l'Union des écrivains biélorusses, Olga Ipatova, soupire. «Ce à quoi nous assistons, ce n'est pas la sauvegarde, mais l'extermination de la culture biélorusse. Regardez ce qui se passe ici !» dit-elle, montrant l'armoire qui vient d'être expulsée d'une pièce voisine. L'Union des écrivains, qui compte quelque 400 membres, coupables de critiques du Président et de promotion de la langue biélorusse, est en passe d'être définitivement chassée de sa grande maison du centre de Minsk. Dans la ligne de mire également, le Lycée biélorusse, soupçonné de former des esprits trop critiques, de même que l'Université européenne des sciences humaines. Pourquoi, contrairement aux Ukrainiens voisins, les Biélorusses acceptent-ils encore cette très mauvaise farce ? Nouveau soupir de l'écrivaine : «Nous avons une histoire particulièrement difficile. Quatre cents ans sous domination polonaise, deux cents ans d'empire russe... La Deuxième Guerre mondiale, Tchernobyl, qui continue à faire des milliers de morts chez nous tous les ans, puis maintenant Loukachenko. Nous sommes un peuple à bout de souffle.»

(1) Par précaution, plusieurs personnes citées craignant des représailles ne seront pas identifiées.


Lorraine MILLOT Liberation

Samedi 26 février 6 26 /02 /Fév 00:00

Où comment les Romains ont inventé le couple puritain!!

Un peu d'histoire pour se cultiver.

Ils auraient, si l'on en croit Ovide, célébré l'art d'aimer. L'art, peut-être, mais la manière? Les Romains étaient-ils vraiment ces bons vivants éclairés, libres dans leurs mœurs et dans leurs pensées, comme le laissent imaginer leurs statues de nus au sexe fier, leurs poèmes érotiques, leurs élégies et leur réputation d'heureuse décadence dont sont faits nos clichés? Libérés, les Romains? Epanouis? Dites-le à Paul Veyne, notre grand spécialiste du monde antique. Il s'étrangle de rire. Non, nous explique-t-il, les Romains ne sont pas fidèles à leurs belles images.  

C'est même tout le contraire! Chez eux, les rapports entre hommes et femmes, hommes et hommes, hommes et esclaves tenaient davantage de la sexualité de corps de garde. Ce qui n'empêchait pas nos menteurs de Romains d'être chrétiens avant l'heure. Et même puritains. Eloignez les enfants de votre magazine préféré: ce n'est pas vraiment la Rome de leurs livres scolaires... 

Ils s'aiment?
Il s'agit non pas d'amour mais de mariage, ce qui est bien plus sérieux. Le mariage est un devoir de citoyen, et il est de bon ton que les époux s'entendent. Dans leur représentation sur les sarcophages, ils se tiennent toujours la main, comme pour suggérer une forme d'égalité. Une formule revient sans cesse dans les textes: «J'ai vécu vingt-cinq ans avec ma femme sine querela, sans avoir eu à me plaindre d'elle.» Cela veut dire qu'elle était fidèle. Les moralistes sévères ajouteraient que le mari doit autant fidélité que la femme. Telle est du moins la morale officielle... Mais nos époux ne sont que deux subtils symboles, deux beaux mensonges...

L'image ne correspond donc pas à la réalité?
Le monde romain est celui de l'esclavage. L'épouse n'est qu'une «petite créature», comme le disait Michel Foucault des gens qu'il dédaignait. On la bat, à l'occasion. Si on la ménage, c'est à cause de sa dot ou de son noble père. L'épouse est là pour faire des enfants et arrondir le patrimoine. Elle n'est qu'un outil du métier de citoyen, un élément de la maison, comme le sont les fils, les affranchis, les clients et, en bas de l'échelle, les esclaves. Sénèque l'écrit: «Si ton esclave, ton affranchi, ta femme ou ton client se met à répliquer, tu te mets en colère.» Et il est admis que le maître... s'envoie toutes ses petites esclaves, et ses petits esclaves. Ils sont là pour cela! On en fait ce qu'on en veut. Garçons et filles. On dépucelle les jeunes filles. Ou l'on choisit les garçons: cela crée moins de difficultés. Mais, attention! si l'on est marié et que l'on ait des bâtards, personne ne doit dire que ces enfants-là sont du maître, bien que tout le monde le sache.

Comment se comportent ceux qui ne sont pas mariés?
Certains préfèrent l'union de second ordre avec une inférieure, une esclave que l'on a affranchie et avec qui on se met en «concubinat». C'est une option parfaitement reconnue. La différence, c'est que les enfants qui en résultent n'héritent pas. Si bien que la grande question est celle-ci: est-ce que j'en reste à mon harem d'esclaves, à mon affranchie favorite, ou est-ce que je me marie, en homme sérieux, pour donner à l'Etat des citoyens de plein droit? Sénèque décrit ainsi celui qui hésite: «Modo vult concubinam amare, modo mulierem» - il veut tantôt avoir une concubine, tantôt une femme; il n'arrive jamais à se décider. Le mariage est donc un acte civique, quasi militaire, les deux aspects étant confondus chez les Romains. Mais il est privé: on ne passe pas devant l'équivalent d'un maire ou d'un curé, on ne signe aucun contrat, sauf un engagement de dot, s'il y en a une. Quant à l'héritage, il est presque totalement libre. On divorce de la même manière: quand on en a envie.

On imagine que la femme, cette petite créature, n'en a pas la possibilité.
Détrompez-vous! Certes, le monde romain est profondément machiste. Mais la femme est plus libre que dans le monde grec, où elle est traitée comme une enfant irresponsable. A Rome, elle divorce quand elle veut. Il arrive ainsi que le mari ne sache même pas s'il est encore marié ou divorcé. Messaline, s'ennuyant près de l'empereur Claude, a divorcé et s'est remariée sans le lui faire savoir! Normalement, il convient d'envoyer une lettre au conjoint pour l'en avertir. Au moins par politesse... Souvent, une femme riche non mariée exerce le «métier» de femme entretenue. Si un homme établit une liaison avec elle, elle est en droit de réclamer une pension. Si elle est veuve, elle administre ses biens elle-même et a toute liberté de rédiger son testament. A Rome, la «chasse à la veuve» était l'un des modes usuels d'amasser une fortune.

Tolère-t-on l'adultère?
Tout dépend des maris. Ceux qui ferment les yeux ne sont pas bien vus. On ne rit pas du cocu; on le blâme, pour son manque de fermeté envers sa femme. Il ne fait ni un bon citoyen ni un bon chef. La mentalité romaine, c'est toujours une histoire de chef. Si l'on surprend son épouse avec un amant, alors, là, tout est permis. Soit on le fait compisser par tous les esclaves et la valetaille, soit, plus radical, on lui inflige le traitement d'Abélard: la castration. En toute légalité.

On idéalise le couple, on considère la femme comme inférieure, mais on lui laisse certaines libertés... Tout cela semble paradoxal.
C'est ainsi. Il ne faut pas chercher la cohérence dans cette morale. Un détail cru, que nous racontent Martial et Sénèque, en montre l'invraisemblable: le jeune époux ne déflore pas sa femme dès la première nuit; il la sodomise. Et cela dans la meilleure société! On se rapproche du monde musulman. La nuit de noces est un viol légal... Dans les campagnes, on pousse la jeune fille dans un coin, on la viole, éventuellement on l'épouse. On va aussi violer en groupes. Les supporters des gladiateurs, par exemple, sèment souvent la terreur. La courtisane du pays en est souvent la victime. «Elle est là pour ça...»

C'est cela, le civisme dont vous parliez, qui se confond avec l'ordre militaire? Etre un vrai chef, même au lit? C'est carrément une idéologie de corps de garde!
Totalement. Rome est une société militariste. De vertu, ils n'en ont pas. D'organisation, non plus. Quand on dit que le système impérial romain est un génie de l'organisation, c'est de la rigolade! Il y avait une guerre civile à chaque changement de règne. Mais les Romains naissaient avec la conviction qu'ils étaient faits pour commander au monde, aux femmes et aux esclaves... Très tôt, les jeunes garçons vont au bordel, encouragés par les pouvoirs publics. Un jour, Caton le Censeur, homme sévère, voit des jeunes garçons entrer dans une maison de tolérance. Il leur dit: «Bravo! C'est mieux que d'aller coucher avec des femmes mariées!» L'important est de ne pas mettre le désordre dans les familles.

Aurait-on raison d'affirmer que la société romaine est débauchée?
[Paul Veyne explose de rire.] C'est à pleurer! Mais non! On imagine l'Antiquité d'après le Satiricon et Fellini. C'est exactement l'inverse! Le monde romain est un monde mahométan avant l'heure! Il est totalement puritain! D'où, justement, le Satiricon: il décrit non pas ce que l'on fait mais ce que l'on ne fait pas, ce que l'on rêve de faire! On en bave, comme un collégien d'aujourd'hui devant un magazine porno. Dans la réalité, il y a une vraie censure des mœurs. On ne fait l'amour que la nuit, sans allumer de lampes (sinon, dit-on sans y croire, cela souille le soleil). Seuls les libertins le font de jour. L'honnête homme ne voit donc pas son épouse nue, sauf peut-être aux bains... Parfois, la nuit, il peut avoir une chance... Ah! la lune qui pénètre dans la chambre et révèle d'un coup la nudité... C'est le grand cliché des poèmes...

Mais ces statues nues, partout dans les rues, dans les palais...
Elles montrent à quel point l'imaginaire est différent des conduites réelles et du discours officiel. Avec les statues de déesses, les Romains se sont fait de la femme l'idée la plus noble, la plus sensuelle, la plus distinguée qui soit: Junon est une grande dame; Vénus, une splendeur; Diane, une chasseresse indépendante... Et une Vénus nue que l'on peut voir au musée du Capitole, à Rome, montre une ligne du dos si verticale, si noble, qu'on était tenté de la surnommer «la princesse au beau râble». L'imaginaire va loin... Mais il n'a rien à voir avec ce verbiage civique, ces mœurs d'esclavagistes et ces pratiques de puritains. L'abîme entre le machisme des Romains et leur noble imagination est considérable.

Dans la réalité, les tabous sexuels étaient donc nombreux.
Beaucoup de gestes de l'amour sont absolument vomis (c'est la raison pour laquelle les textes en parlent à satiété), la fellation, notamment, et surtout le cunnilingus, qui déshonore un homme parce qu'il se met au service d'une femme. Il y avait trois horreurs suprêmes pour un Romain: coucher avec sa sœur, coucher avec une vestale, se faire sodomiser. Trois choses que l'on a attribuées à des tyrans, comme Néron et Caligula (qui était un dément précoce). Pour les homosexuels, l'important est de sabrer, et de ne pas être sabré. Il faut toujours dominer. Un esclave ne compte pas; il est là pour être consommé. Un homme libre, en revanche, ne doit pas se laisser faire. Il a sa dignité! Ce qui est le plus condamné par un Romain, c'est la mollesse. Si vous êtes trop sensible à la féminité, si vous prêtez votre bouche, vous êtes mou. C'est pire que tout!

Inutile d'évoquer le plaisir féminin...
Le plaisir de la femme, c'est mal. Un texte dit: «Il vaut mieux finalement coucher avec des femmes esclaves ou affranchies, parce que, si tu commences à jouer au jeu de l'adultère mondain avec les femmes du monde, tu es obligé de les faire jouir.» Les termes les plus vifs parlent de femmes dont le ventre est un «puits à plaisir». Avec leur appétit, les femmes détournent les hommes du devoir, dit-on. Le plaisir féminin est un gouffre d'hystérie; le plaisir masculin est une faiblesse dont on ne parle pas. Il ne doit servir qu'à faire des enfants, dans le mariage.

Ils en cachent, des secrets peu reluisants, nos deux Romains sur leur fresque! Une chose manque dans cette histoire crue... On ose à peine prononcer ce mot: l'amour.
Oh! là, là! Pour les Romains, l'amour est un grand danger! La maîtrise de soi militaire impose de ne pas céder à ses sentiments. Un homme qui s'intéresse trop aux femmes n'a aucun contrôle sur lui-même. Il n'est pas un homme. La passion, c'est bon pour les poètes. Dans les romans, on raconte l'histoire de deux amoureux qui connaissent les péripéties les plus invraisemblables: la femme est vendue par des brigands, exilée, mais, au moment où elle va être violée, Jupiter foudroie les méchants... Elle s'en tire et reste vierge. Ils se marieront et vivront heureux. Ce n'est que du roman...

Et puis, brusquement, vers le IIe siècle de notre ère, les Romains se donnent une nouvelle morale...
Oui. C'est un changement mystérieux qui se produit peu avant l'an 200, au temps de Marc Aurèle. Une autre Antiquité commence. Tout se durcit. On se met à interdire les mauvaises mœurs, alors qu'on en rigolait, jusque-là. Peu à peu s'instaure une très vive hostilité à l'avortement et à son substitut, l'exposition d'enfants, qui était courante et quasi officielle. On stigmatise les veuves qui couchent avec leur régisseur. On sévit à l'encontre de l'homosexualité. Désormais, l'entente dans le mariage, qui n'était que souhaitée, devient un contrat mutuel (mais il ne s'agit toujours pas d'amour). L'adultère du mari est considéré comme aussi grave que celui de la femme (mais on ne le punit pas vraiment, il ne faut pas exagérer!). Les époux doivent être chastes, ne pas trop se caresser, et ne faire l'amour que pour procréer. La sexualité, c'est pour faire des enfants! Les Romains ont inauguré le couple puritain! Ils ont inventé la morale conjugale!

Mais c'est le mariage chrétien que vous décrivez!
Exactement! Le mariage dit «chrétien» est né avant les chrétiens! Ceux-ci se sont contentés d'adopter et de durcir la nouvelle morale païenne, le stoïcisme de Marc Aurèle, en y ajoutant leur propre haine du plaisir. Dire que le christianisme est le fondement de notre morale est donc dépourvu de sens! C'est sous les Romains que celle-ci s'est forgée, pour des raisons que nous ignorons. Mais les mœurs ne changent que lentement. Paulin de Pella, chrétien de la grande noblesse de Gaule, aura, au Ve siècle, cette phrase admirable: «Dans ma jeunesse, je me suis beaucoup adonné à l'amour, mais, attention! je couchais uniquement avec mes esclaves!» En d'autres termes, je suis resté chaste. Cela en dit long sur l'évolution de la morale.

Survient la décadence de l'Empire. On suppose, après vous avoir écouté, que nos idées sur cette fin sont aussi erronées. Toujours pas d'orgies, de bacchanales?
Bien sûr que non! Au contraire, ça se crispe encore: en l'an 394, un empereur chrétien fait saisir pendant la nuit tous les prostitués mâles des bordels de Rome et ordonne qu'ils soient brûlés en public. La même année flambe la première synagogue. La même année débarque à Carthage un homme chargé de démolir les temples païens. On commence à persécuter les hérétiques et les schismatiques. C'est l'interdiction du paganisme. Les derniers Romains de cette histoire sont vissés par les chrétiens, par les stoïciens, par les platoniciens. Ils n'ont jamais si peu rigolé! Désormais, l'ordre sexuel va régner.

Propos de Paul Veyne, professeur honoraire au Collège de France recueillis par Dominique Simonnet - L'express 2002

 

Jeudi 24 février 4 24 /02 /Fév 00:00

Le cinéma X:  produit médiocre, produit culturel ? 

La suite de l'analyse présentée hier soir.Bonne lecture

Une façon radicale de situer la vastitude du problème posé par le cinéma dit X consiste à s'en tenir à la rigueur très hard des chiffres bruts : le porno, combien de divisions ? Aujourd'hui, le cinéma hollywoodien standard, réputé le plus puissant du monde, produit un maximum d'environ 400 films par an. Pendant ce temps, dans ce même grand et beau pays, l'industrie du cinéma porno en produit à peu près 10 000... Aux Etats-Unis toujours, plus de 700 millions de cassettes et DVD porno sont loués chaque année et les revenus générés par l'industrie du cul dans sa globalité (films, magazines, télévision, Internet) sont estimés entre 10 et 14 milliards de dollars (de 7,5 à 10,5 milliards d'euros). Un chiffre dont le New York Times a calculé qu'il était non seulement supérieur à celui de l'industrie hollywoodienne classique mais qu'il devançait aussi celui du football, du basket et du base-ball professionnels réunis ! Face à un tel stakhanovisme, qui pourrait encore prétendre que la profession du X est un ramassis de branleurs ?

En France, le cinéma porno échappant à la tutelle du CNC, aucun chiffre fiable n'est donc disponible, mais on estime néanmoins que les proportions sont équivalentes. Le paysage télévisuel lui-même est fort éloquent sur ce point : pas plus tard que samedi dernier, autour de minuit, une bonne douzaine de films pornos s'infiltraient sur les canaux satellitaires et câblés du spectateur français. Un tel rapport de force devrait suffire à prendre, ne serait-ce qu'un instant, le cinéma porno au sérieux, à la fois comme bloc culturel opaque, colossal mais tabou, et comme chapitre considérable de l'histoire de la sexualité humaine et de ses représentations.

Ce début de considération est en train de voir le jour aux Etats-Unis, sur le campus californien de Berkeley, toujours à la pointe, où les «Porn Studies» ont vu le jour sous la houlette déterminée de la professeure Linda Williams, qui enseigne là-bas le cinéma et la «rhétorique», et dirige depuis cinq ans le département des Film Studies. On peut sans risque associer Linda Williams à sa collègue de fac Judith Butler (1) ou à Eve Kosofsky Sedgwick (2), et à tous les chercheurs américains qui ont travaillé sur la sexualité dans la tradition de Michel Foucault, avec lequel Linda Williams tient à revendiquer une filiation.

Linda Williams a donné ses premiers cours sur la pornographie en 1994, quelques années après avoir assis sa réputation universitaire avec Hard Core, son premier essai sur le sujet (lire page III). Avec ses étudiants, elle a défriché aussi bien les champs du porno underground que du porno standard, celui du porno pionnier et celui du porno contemporain. Toutes les typologies du porno l'intéressent, qu'il soit hétérosexuel, homo, lesbien, sadomaso, bisexuel, fétichiste, interracial... Chacune des dix semaines qu'a duré ce cours inaugural comprenait la projection d'un ou deux longs métrages, à la suite desquels étaient analysés et discutés d'un point de vue critique les concepts de plaisir et de pouvoir. Au fil des ans, de cours en séminaires, Linda Williams s'est spécialisée dans ce domaine que les disciplines universitaires classiques ont longtemps ostracisé. Le bilan de ces études a été publié il y a quelques mois sous le titre Porn Studies, certainement le recueil d'essais et d'analyses les plus passionnants jamais rassemblés sur cette brûlante question.

 Sur d'innombrables points, c'est un livre du dessillement : les problèmes que soulève le cinéma pornographique y sont posés d'une façon entièrement revivifiée et l'on mesure vite, à la lecture des nombreux essais qui composent l'ouvrage, que l'étude académique de la pornographie est un levier intellectuel formidablement libérateur, qui permet d'appréhender sous des perspectives nouvelles non seulement des questions sexuelles, ce qui tombe sous le sens, mais aussi politiques, sociales, raciales, esthétiques. La principale révolution symbolique à laquelle est conduit le lecteur de Porn Studies tient sans doute à son propos politique implicite, que l'on pourrait résumer ainsi : l'histoire du cinéma pornographique est d'abord une histoire de la démocratisation de la pornographie.

En d'autres termes, le cinéma X consacre l'accès massif des classes moyennes et populaires à une culture de la représentation sexuelle jusque-là réservée à l'élite des intellectuels et des nantis. Exemple historique frappant : la découverte, en plein XIXe victorien, et tandis que s'élaborait le concept même de pornographie, des fameuses fresques sexuelles de Pompéi. La réaction «scientifique» immédiate a été de les soustraire secrètement aux yeux du public, pour en réserver les usages à une élite de savants, historiens de l'art, notables, exclusivement masculins, dans des salles privées du musée Borbonico. D'une certaine manière, la culture pornographique populaire d'aujourd'hui est le témoin du chemin parcouru depuis la découverte de ces fresques «indécentes», et le cinéma X contemporain raconte à sa façon l'histoire de la réappropriation de cette culture par ceux auxquels elle était préalablement refusée, c'est-à-dire les classes dominées mais aussi les femmes (éloquente étude de mangas sexuels à destination du public féminin nippon).

On voit bien la charge subversive potentielle qu'un tel discours charrie. Dans son introduction, Linda Williams prend un malin plaisir à mettre en parallèle la prolifération objective de la pornographie aux Etats-Unis (mais la démonstration serait valable pour le monde entier : le porno étant lui-même vecteur et agent de la globalisation, il fleurit actuellement partout et à toute vitesse) avec le contenu de certaines polémiques fameuses, comme le rapport du procureur Starr sur l'affaire Clinton-Lewinsky ou celui du sénateur Jesse Helms contre les «dirty photos» de Robert Mapplethorpe, deux monuments de faux-culterie puritaine qui prétendaient bannir ce dont ils se délectaient. La démonstration paradoxale des «Porn Studies» tient dans ce renversement : nous appelons «ob/scène» (ce qui doit rester caché de la «scène», de la vision) ce qui est en réalité devenu «on/scène», et fait partie intégrante du paysage de nos vies. Réglant au passage son compte à l'opposition hypocrite entre le «bien» de l'érotisme et le «mal» de la pornographie, Linda Williams établit finalement le cinéma pornographique comme «une forme culturelle qui influence la vie d'une large variété d'Américains, et qui doit être prise en compte dans l'évaluation que nous faisons nous-même de notre culture».

 Olivier SEGURET 23 02 2005 Liberation

 

 

Mercredi 23 février 3 23 /02 /Fév 00:00

Un article intéressant sur des questions trop souvent delaissées du champ des études et de la réflexion. Même si beaucoup de nous sont des amateurs du genre.

Bonne lecture à tous.

Linda Williams, a dirigé le livre «Porn Studies» Comment est né le concept de Porn Studies ?

Au départ, en tant qu'universitaire, je préparais un livre sur le corps et sa représentation. Dans le cadre de mes recherches, j'avais prévu un chapitre sur la pornographie. C'est en commençant à y travailler que je me suis aperçue à quel point j'étais moi-même victime d'idées reçues sur cette question. Mon angle était celui d'une féministe très classique : j'abordais le sujet avec des réflexes comme celui de la soumission de la femme, sa transformation en objet ou la question du regard masculin unilatéral. Mais je me suis rendu compte que ces idées étaient fausses, que tout un pan du cinéma porno y échappait. J'ai découvert que le porno avait une histoire, des évolutions, une culture. Du coup, ce chapitre est devenu le coeur d'un autre travail, l'étude de la pornographie. C'est ainsi que j'ai publié Hard Core : Power, Pleasure and the Frenzy of the Visible, en 1989. A l'époque s'affrontaient des positions féministes antagonistes. Mon livre, dans ce débat, plaidait en faveur d'une étude du cinéma pornographique en tant que genre spécifique. La question centrale est celle de la représentation : comment figurer le plaisir sexuel ? C'est le fascinant défi que relève la pornographie. J'ai décidé d'en faire le sujet de mes cours et j'ai rassemblé sous le titre de Porn Studies une anthologie des meilleurs travaux produits autour de ces questions.

Vous définissez-vous comme féministe ?

Il faut distinguer deux courants du féminisme américain : le féminisme antipornographique, que l'on peut qualifier de puritain, et le féminisme anticensure. A l'époque de la publication de Hard Core, le porno était le bouc émissaire des discours féministes. Il y a eu des débats très tendus. J'ai toujours pensé que c'était une énergie gâchée : pourquoi combattre le porno et non pas les causes premières de l'oppression des femmes, dont le porno n'est pas responsable ? Je me définis donc comme une féministe «pro-sex», selon les termes en vogue dans le mouvement universitaire des gender studies, des gay and lesbian studies, des queer studies.

Comment Porn Studies a-t-il été reçu ?

La réception du livre a été plutôt favorable lors de sa sortie, en juillet dernier. Il a réalisé de bonnes ventes mais n'a pas soulevé de débat majeur. Depuis 1989, les choses ont beaucoup évolué. Il est aujourd'hui admis que le porno puisse être un objet d'étude. C'est un point focal de nos sociétés, révélateur de beaucoup de problèmes connexes qui touchent aux questions raciales, aux identités, au genre et, bien sûr, à la sexualité. Je n'aime pas tellement le mot, mais je trouve le porno... «libérateur».

Le livre établit des différences entre les pornographies homo- et hétérosexuelles.

Ce sont deux histoires parallèles. Le porno gay est plus «célébratoire», les questions de pouvoir sont beaucoup plus importantes dans le porno hétérosexuel. C'est d'ailleurs l'aspect auquel mes élèves féminines sont le plus sensibles. Chez les gays, les représentations du pouvoir sont beaucoup plus ludiques et surtout fréquemment réversibles, ce qui change tout.

La pornographie devient-elle respectable ?

En tout cas, le monde professionnel du X est avide d'attention et de respect. J'ai participé à des conférences réunissant le monde porno professionnel et des universitaires. C'était très intéressant. Les interventions ont été regroupées en un recueil intitulé Anthology Porn 101. Les gens du X trouvaient là une forme de la légitimité qu'ils recherchent tant. Je me suis également rendue à la cérémonie des AVN Awards (les «oscars» du X, remis chaque année à Las Vegas sous le haut patronage de la revue Adult Video News, ndlr). Mais Hollywood et le cinéma porno appartiennent à deux mondes étanches. Les passages de l'un à l'autre sont rarissimes, aussi bien pour les cinéastes que pour les acteurs.

Comment interprétez-vous la forte croissance des industries pornographiques ?

Je me considère comme trop foucaldienne pour ne pas replacer la prolifération de l'image pornographique dans le contexte de l'explosion des discours sur la sexualité dans la culture contemporaine. Nous vivons dans un monde où il est important de trouver les moyens d'apprendre ce que sont la sexualité et le plaisir à travers leurs représentations. Je ne sais pas si c'est bien ou mal : c'est comme ça, et il est de mon devoir de regarder les choses en face. La sexologie, la pornographie font partie de ce mouvement global. Il y a quelques années, mes étudiants n'étaient pas tous familiers de l'image porno. Aujourd'hui, on ne trouve plus un seul étudiant qui n'aurait jamais vu de pornographie, y compris chez les étudiantes. Par ailleurs, si le porno est aussi populaire, c'est précisément parce qu'Hollywood lui a tourné le dos ! Le cinéma standard a tracé une ligne infranchissable : la représentation frontale et explicite du sexe. Tant qu'Hollywood s'y refusera, le cinéma porno sera là pour combler ce vide.

Linda Williams est prof de cinéma et de rhétorique à l'université de Berkeley (Californie). Depuis 1989 et la publication de Hard Core, elle a développé l'étude académique du cinéma X et de la pornographie, et en a rassemblé les meilleures recherches dans le livre collectif Porn Studies.

Libération - 02/2005

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