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La revue de presse

Vendredi 28 janvier 5 28 /01 /Jan 00:00

Les nouveaux univers des libertin(e)s

Mode sulfureuse, jeune littérature coquine, lieux de rencontre inattendus... l'érotisme revient en force et en charme, après des années de porno triste. Un retour aux sources du libertinage qui nous invite à savourer une sensualité complice et pleine de fantaisie

Eros serait-il de retour? Peut-être est-il trop tôt pour l'annoncer, tant ces années de sexe trash, où de tristes anatomies s'exhibaient dans les rues grises, peinent à se refermer. Qu'importe! Légère, impertinente, hédoniste, une sensualité diffuse réchauffe la morosité automnale. A l'heure où les Galeries Lafayette, à Paris, ouvrent 3 000 mètres carrés consacrés à la lingerie féminine, les défilés de la saison 2004 ornent les corps de guêpières, de mousselines, de dentelles et de porte-jarretelles. Bref, la panoplie de la parfaite libertine du XVIIIe siècle. Sexy, mais cultivée. De la jeune littérature érotique aux DVD postporno, des jeux de société lubrico-ludiques aux leçons d'effeuillage à domicile, la fièvre monte dans les alcôves. Laissons-nous donc griser par ce nouveau souffle libertin qui, du simple marivaudage à l'art de la chambre à coucher, accouple allègrement amour et humour.

 

 

Point trop d'enthousiasme cependant, car la tendance s'amorce tout juste. Nous avons tous assisté, ces dernières années, à un étalage de chairs à l'antithèse de toute sensualité. Transgressant les tabous, des auteurs comme Michel Houellebecq, Catherine Millet, Catherine Breillat, Virginie Despentes ou Daniel Karlin ont disséqué la sexualité à travers un regard froid, clinique et désenchanté. La mode et la publicité ont opté pour l'esthétique porno et la télé réalité, en plantant ses caméras dans les chambres du Loft, a excité nos instincts voyeuristes. Enfin, regrette Philippe Brenot, psychiatre, «on a surmédiatisé les pratiques échangistes, alors qu'en réalité elles sont marginales et concernent moins de 1% de la population». Qu'en est-il ressorti? Une vision désincarnée de la sexualité, qui a poussé nombre d'intellectuels, comme Jean-Claude Guillebaud, à dénoncer cette tyrannie du plaisir.

 

Car, à trop parler de sexe, peut-être a-t-on occulté l'essentiel: le désir, ce mystérieux frisson qui parcourt l'échine et réveille les fantasmes enfouis. Comment, alors, rallumer la flamme? Des cinéastes s'interrogent. Loin de Baise-moi, de Virginie Despentes (2000), les trois succès français de l'année 2003 sont des vaudevilles au romantisme acide. Marc Esposito ausculte les palpitations du Cœur des hommes; Michel Blanc nous conseille: Embrassez qui vous voudrez; et Didier Bourdon tente de réveiller la libido de sa femme (Catherine Frot) après Sept Ans de mariage. Le public accourt: à eux trois, ces films comptabilisent près de 5 millions d'entrées.

 

Il semble donc que l'heure soit au batifolage. En France, les 13 millions de célibataires l'ont bien compris, qui ne cessent de badiner avec l'amour. Oublié le speed dating, zapping sentimental déjà dépassé. Dans les bars branchés de Manhattan et de Londres, les quiet parties, ou soirées silencieuses, font fureur. Il est interdit de parler: on ne communique que par écrit, avec Post-it et crayon. Retour du billet doux, cher au marivaudage? Il faut le croire. Ici, comme lors des jeudis drague du Lafayette Gourmet, baptisés «dating market», nulle obligation de résultat: on flirte ou non; on couche ou non. Le champ du désir reste ouvert.

 

Dans une société où prime l'ascension sociale, l'horizontal commence aussi à prendre sa revanche. Avec la mode du lounge, les restaurants invitent à s'étaler langoureusement, à la romaine, sur des sofas et des méridiennes. Les lits deviennent king size et même les salles obscures, désormais, militent pour le rapprochement des corps. Le MK 2 Bibliothèque, à Paris, a inventé le «fauteuil pour deux», dessiné par le designer Martin Szekely, histoire de se peloter gentiment dans une obscurité bienveillante. «Nous étions dans des valeurs masculines et guerrières, constate Vincent Grégoire, du bureau de style Nelly Rodi. Aujourd'hui, on a envie de féminité, de douceur et de légèreté.»

 

Aux nombreux couples complexés qui se pressent dans son cabinet André Corman conseille de «dédramatiser le sexe, qui n'est pas une compétition». Pour ce sexologue, «le fantasme vient du mot fantaisie. L'érotisme, c'est d'abord du jeu. Alors amusons-nous»! Trente ans après la libération sexuelle des années 1970, une révolution sensuelle commence donc à s'opérer dans le secret des alcôves. Les héroïnes de la série télé Sex and the City furent les premières à insuffler une gaieté licencieuse dans notre vie quotidienne. Désormais, plusieurs créatrices leur emboîtent le pas. Chez Dior Joaillerie, Victoire de Castellane a dessiné des bijoux aux noms suggestifs et ironiques: une bague Alors heureuse, des colliers Provocante et Nuit blanche, avec des nœuds très sages pour le début de soirée, puis défaits en une amorce de strip-tease chic.

 

 

Plus torride encore, mais loin des sex-shops de la rue Saint-Denis, Rykiel Woman apporte une touche d'élégance aux plaisirs féminins. Dans cette boutique-boudoir pour Eve séductrices, les godemichés, rebaptisés «sex toys», côtoient la lingerie fine en crépon de soie, les liseuses en fourrure et les peignoirs en pashmina. A 87 €, le Lapin, pénis rose bonbon gros à faire rougir, vu dans Sex and the City, est le best-seller incontesté et on se l'arrache depuis des mois. Parfois dessinés par des stars du design (Tom Dixon, Marc Newson...), ces gadgets érotiques ne sont pas les auxiliaires glauques d'une misère sexuelle, mais les symboles d'une libido joyeuse et épanouie. Et se glissent sans complexe dans le sac à main des fashion victims, entre le gloss et le portefeuille.

 

Pour celles (et ceux) qui voudraient rallumer le désir dans leur couple, Violeta Carpentier a ouvert, en janvier 2003, Art Strip, une école de l'effeuillage à domicile. «Nos clientes ont de 20 à 45 ans, et elles veulent offrir un cadeau original à leur compagnon, pour leur nuit de noces ou pour raviver l'étincelle. On leur apprend à se déshabiller sur une chorégraphie simple, en général sur la musique de Neuf Semaines et demie, l'air le plus demandé. On montre comment dégrafer son soutien-gorge d'une seule main ou enlever son string sans l'accrocher aux talons aiguilles. C'est sensuel et ludique.»

 

Pourquoi ce besoin actuel de théâtraliser l'intime? «Une femme a 25 fois moins de testostérone, l'hormone du désir, qu'un homme, explique Pierre Langis, professeur de psychologie de la sexualité au Québec. Son appétit sexuel est moins biologique, mais plus émotionnel, plus esthétique et plus créatif.» Aujourd'hui, ce sont les femmes qui entraînent les hommes dans cette quête du plaisir. Les couples recherchent des sensations nouvelles et une culture de l'érotisme, jusque-là réservée à une élite esthète.

 

Car l'art de la chambre à coucher, cela s'apprend. Véronique J., créatrice d'une école de séduction à Paris, a dû intégrer, depuis deux ans, des cours de sexualité à ses stages. «Je vois arriver des trentenaires qui ne savent pas caresser une femme!» se désole-t-elle. Des guides pour une sexualité épanouie au Bistro Sexo, d'Hélène Lechevalier (une psychanalyste tantrique qui organise des réunions d'information sur le sujet une fois par mois, à Paris), de plus en plus de spécialistes tentent de combler ce manque. Dans un pays où il n'existe pas d'ars erotica, selon le philosophe Michel Foucault, dans son Histoire de la sexualité (Gallimard), mais seulement une scientia sexualis, l'érotisme est à inventer.

 

Des artistes s'y attellent. Et défrichent cette Zone érogène, du nom d'un groupe multimédia qui défend une esthétique post-porno. «Le sexe a été laissé aux mains des pornographes et des médecins, constate Gilles Verdiani, 37 ans, vidéaste et l'un des cofondateurs du groupe, avec Nils Thornander. Il est temps que l'artiste érotise le monde.» Entre cinéma et art contemporain, «nos films sont des invites, par le son et l'image, à aller faire l'amour.» Nathalie Rykiel, de son côté, proposera, à Noël, un coffret de DVD érotiques: «Des films libertins du début du siècle, muets et en noir et blanc, mais complètement hot», promet-elle. André Corman le résume joliment: «Une sexualité sans érotisme, c'est de la gymnastique. Avec, c'est une chorégraphie.» Votre chambre à coucher ne sera plus jamais la même.

 

par Dalila Kerchouche, Léa Delpont- L'express

 

Dimanche 23 janvier 7 23 /01 /Jan 00:00

Un livre de Ryû Murakami pas forcément facile à lire mais il permet de découvrir une face cachée du japon.  A lire pour ceux qui n'ont pas froid aux yeux.


Ca n’est pas une descente aux enfers, c’est plutôt le contraire. Après la guerre, une jeunesse japonaise se cherche, ou plutôt se perd dans les méandres de tous les excès possibles. Drogues, sexe, violence, tout est bon pour oublier qui on est. Ryû est à la fois participant et observateur de ces excès, il les ressent avec une acuité amplifiée par le recul. Il ne fera rien pour changer, et pourtant, le changement est déjà en lui.

Dans un style presque clinique, Murakami raconte ce qui fut vraissemblablement sa jeunesse. Passant tantôt de la troisième personne à la narration subjective, il dévide les jours et les nuits, indifférent à l’horreur et à la décadence. Ces orgies, décrites simplement, amènent le lecteur à une fascination morbide, mélange d’attirance et de répulsion. C’est qu’on finit par chercher la vérité dans tout ce désordre, on la recherche activement, dans l’espoir de la trouver, simplement parce qu’on imagine pas qu’une telle vanité puisse être possible.

A travers les visions des personnages, et surtout leur réaction vis-à-vis de celles-ci, on les découvre le plus en plus, comme dans un miroir. La mise en abyme, provoquée par des scénes calmes de la vie quotidienne, finissent par rapprocher Ryû du sublime, jusqu’à la révélation prophétique de l’oiseau noir.

Malgré la noirceur, on en ressort grandi, plein d’une nouvelle foi qui ne demande qu’à s’éroder face à la réalité.

Un extrait :

« T’es bizarre, Riû : t’es pas heureux. Même les yeux fermés, je parie que t’essaies de voir des tas de trucs. Je ne sais pas très bien comment te dire, mais du moment que tu trouves quelque chose qui te plaît bien, vraiment bien, pourquoi t’irais te creuser la cervelle pour y chercher encore autre chose en plus, tu crois pas ? Mais toi, faut toujours que t’essaie de voir autre chose, justement, à toute force, et de prendre des notes comme un savant qui fait de la recherche. Ou même comme un petit gosse. D’ailleurs, c’est ça que t’es, au fond : un gosse. A cet âge-là, on veut tout voir, non ? Un bébé, les gens qu’il connaît pas, il les regarde avec des grands yeux, puis il rit ou il pleure. La différence, c’est que toi, maintenant, si t’essayais de les regarder dans les yeux, les gens, tu deviendrais raide dingue dans la seconde. Essaie seulement, je te dis, tiens, avec ceux qui passent dans la rue ; je te jure que tu tiendrais pas le coup longtemps ! T’sais, Ryû, tu devrais pas regarder les choses comme un tout petit enfant. »

Le 21 août 2004 Mario Heimburger

Dimanche 23 janvier 7 23 /01 /Jan 00:00

L'affaire agite la presse américaine et les nombreux spécialistes de ce personnage énigmatique qui a déjà suscité plus de 10 000 ouvrages : Abraham Lincoln (1809-1865), 16e président des Etats-Unis, figure mythique de la guerre de Sécession, chef de file des anti-esclavagistes et symbole du self-made-man américain. Sa vie intime échauffe les esprits depuis longtemps, et une question revient soudain : Abraham Lincoln était-il bisexuel ?

Ce nouvel os à ronger est suscité par un livre : The Intimate World of Abraham Lincoln ("Le Monde intime d'Abraham Lincoln"), de C. A. Tripp. Un ouvrage, publié par la prestigieuse maison d'édition Free Press, qui a obtenu les faveurs du New York Times et des pages d'exégèse dans le magazine Vanity Fair par l'écrivain Gore Vidal - lui-même auteur, entre autres, d'un essai sur Lincoln.

C'est que C. A. Tripp, celui par qui le scandale arrive, est un savant reconnu de la chose sexuelle. Il fit partie de l'équipe de chercheurs entourant Alfred C. Kinsey, auteur en 1948 du Comportement sexuel chez le mâle humain. Psychologue et écrivain homosexuel influent, Tripp est mort en 2003, deux semaines après avoir mis le point final à son ouvrage. Non sans avoir eu le temps de conclure : Abraham Lincoln était gay. Des biographes avaient déjà mentionné le mariage équivoque du président avec Mary Todd (même s'ils eurent quatre enfants) comme sa relation trouble avec Joshua Speed, l'ami de jeunesse avec qui il partagea son lit. Mais, selon C. A. Tripp, aucun n'a osé reconnaître son homosexualité. Lincoln, démontre-t-il en s'appuyant sur des lettres et des récits écrits par des proches du président, avait entretenu des rapports amoureux avec plusieurs hommes, dont le capitaine de ses gardes du corps, David V. Derickson.

Le débat n'est pas clos. "A cette époque de pionniers, écrit David Herbert Donald, professeur émérite à Harvard, deux fois Prix Pulitzer, considéré comme un des meilleurs biographes de Lincoln, l'espace était restreint et les hommes partageaient les lits. Et la correspondance entre Lincoln et Speed n'était pas celle de deux amants." Pour une autre spécialiste, Jean H. Baker, l'indépendance d'esprit du président et ses positions subversives s'expliquent enfin : "En tant qu'homosexuel, il était aux marges de la tradition."

Marion Van Renterghem
Article paru dans l'edition du Monde du 14.01.05

Jeudi 20 janvier 4 20 /01 /Jan 00:00

Le sexe, des corps sans coeur, des coeurs sans corps, vaste sujet ...

bonne lecture.

Enlevez l’amour... Qu’est-ce qu’il reste? De tristes histoires avec «orgasme laïque, gratuit et obligatoire». Démonstration

Le Nouvel Observateur. – Diriez-vous, comme Jean-Claude Guillebaud, que nous sommes aujourd’hui soumis à une «tyrannie du plaisir»?
Dominique Folscheid. – Oui, mais ce n’est à mon sens qu’une conséquence de ce que j’appelle l’impérialisme du sexe. En observant la publicité, les magazines, les émissions de radio et de télé-réalité, le succès de livres comme ceux de Michel Houellebecq ou de Catherine Millet, je me suis demandé ce qu’il y avait derrière ce grand tapage sexuel, derrière ce discours dominant qui prône une sexualité libératrice et libérée, ludique, jouissive et mécanique. J’en ai découvert les racines dans la révolution anthropologique et scientifique du xviie siècle, avec l’invention du corps-machine par Descartes, devenu «l’homme-machine» de La Mettrie, en 1748. Le retentissement en a été immédiat dans les œuvres de Sade. Dans cette lignée, on retrouve plus tard Charles Fourier, auteur d’une utopie dans laquelle l’échangisme est érigé en système (avec des «parties carrées», «sextines» et «octavines»). Enfin il y a eu la grande vague d’inspiration psychanalytique, avec notamment Wilhelm Reich. Tout cela a été théorisé bien avant la révolution sexuelle des années 1960. Depuis, le sexe a quitté la marginalité pour devenir «social-démocrate», comme dit Houellebecq. Nous nous trouvons en face d’un mouvement de fond qui touche toutes les sociétés occidentales et tend à gagner les autres.

N. O. – Comment l’expliquer? Est-ce un avatar du système capitaliste?
D. Folscheid. – Question difficile… Plus largement, nous sommes dans le cadre des dérives majeures de la modernité. Comme le sexe est de nature consu-mériste, au sein d’une société consumériste, sa banalisation et sa géné-ralisation sont évidemment liées à l’essor du système marchand. Il y a aujourd’hui un marché du sexe, extrêmement juteux. Mais ce phénomène est aussi solidaire du développement de la technique. La PMA (procréation médicalement assistée), qui n’est au départ qu’un remède contre l’infécondité, a pris une place majeure dans notre imaginaire social. Au sein de cette sexualité clivée, dissociée, le sexe est devenu une entité à part, déconnectée de la procréation mais aussi du cœur. Aux Etats-Unis, un million de jeunes hommes se seraient fait stériliser après avoir stocké leur sperme en banque, pour pouvoir jouir pleinement. Voyez les magazines de cet été, qui titrent sur les nouveaux jeux du sexe – autre façon de dire que le sexe est un jeu et ceux qui s’y adonnent des jouets. Sans oublier ces émissions de télé-réalité qui proposent d’élire la plus grande séductrice, ou de récompenser le meilleur briseur de couples.

N. O. – Mais cette pratique du sexe n’a pas pour autant tué l’idéal du grand amour…
D. Folscheid.– C’est exact. 90% des jeunes rêvent de l’amour fou et considèrent dans le même temps le sexe comme une activité banale, hygiénique et festive. Les corps sont complètement désinvestis. «Entre nous, ça n’est que du sexe», entend-on souvent. On a d’un côté des corps sans cœur et, de l’autre, des cœurs sans corps. D’où l’apparition étonnante d’un néoromantisme forcené. Plus le sexe devient une activité banalisée, plus on rêve au grand amour. Remarquez ce que disent une bonne partie des adeptes du sexe ludique: «Je préfère l’échangisme en club plutôt qu’une relation continue bas de gamme… en attendant le coup de foudre.»

N. O. –N’êtes-vous pas précisément en train de produire ce que vous dénoncez, un discours général selon lequel tous les Français s’adonnent au sexe sans limites et sans complexes? La plupart des gens ne vivent pas comme ça, et parviennent même parfois à réunir le cœur et le corps…
D. Folscheid. – Certes, l’attitude majoritaire n’est évidemment pas celle-là. Beaucoup de gens doivent être effarés par ces pratiques. Mais du seul fait qu’on en parle de plus en plus, qu’on les présente comme répandues, naturelles, normales même, on produit un discours qui n’a rien d’anodin et qui a des effets. Il a, à mon sens, complètement bouleversé l’imaginaire amoureux de l’époque.

N. O. – Vous voulez dire qu’il nous soumet à une pression insidieuse?
D. Folscheid. – Oui, car il peut engendrer un certain désarroi, donner l’impression que l’on n’est pas dans le coup, que l’on est nul, parce que les films pornos érigent en modèles des performances à la fois surhumaines et inhumaines. L’orgasme est devenu comme l’école: laïque, gratuit et obligatoire. Ceux qui ne l’atteignent pas sont des ratés. D’où le succès du discours sur la «misère sexuelle», dont tout le monde peut se sentir victime. Dans la mesure où l’on a converti le désir en besoin de sexe, on fabrique des cohortes entières de frustrés. Et ne parlons même pas des jeunes générations, qui ont l’imaginaire, l’esprit et même le vocabulaire formatés par le porno!

N. O. – Mais certaines personnes se disent aussi libérées, heureuses de découvrir de nouvelles pratiques…
D. Folscheid. – Une partie de la population, probablement un peu instable, pas très heureuse en amour, est prête à tomber dans le piège du «il faut tout essayer». C’est la conséquence logique de l’impérialisme du sexe, qui transforme les partenaires en objets interchangeables. Au bout du compte le sexe n’a même plus de sexe: il requiert simplement le branchement d’éléments pénétrants sur des creux. Il faut aller toujours plus loin. Mais cette quête indéfinie engendre à la fois frustration et curiosité incessante. On espère toujours qu’un coup de plus apportera un nouveau frisson.

N. O. – Mais est-ce finalement si grave? Ne tombez-vous pas dans un moralisme excessif?
D. Folscheid. – On est en deçà de tout débat moral. Avoir l’imaginaire et le regard formatés au sexe ne peut qu’appauvrir le côté relationnel et amoureux de l’existence. Il y a aussi une perte considérable au niveau du désir, donc de l’érotisme. Derrière cet «essayisme» généralisé, ce culte de l’échangisme, se cache l’aveu d’un désir en panne. On attend qu’un tiers, érigé en rival, vienne raviver son propre désir. Ce sont ceux-là qui disent : «J’adore voir ma femme prendre son pied avec d’autres hommes.» Et la société les pousse: «C’est très bien, au moins, vous n’êtes pas jaloux!» Toute la perversité du système actuel est qu’il milite sans cesse pour l’interdiction des interdits. Il désarme donc la critique (qui aime les interdits?). Mais il se voit contraint de susciter sans cesse de nouveaux interdits pour pouvoir les transgresser! Regardez la presse: elle n’en finit pas de faire sa une sur le thème: «Sexe: le dernier tabou à vaincre». En réalité, il n’y en a plus, à part la pédophilie.

N. O. – L’omniprésence actuelle du sexe traduirait une certaine angoisse sociale?
D. Folscheid. – Autrefois on parlait de la mort, jamais de sexe. Aujour-d’hui, on occulte la mort et on est polarisé sur le sexe. C’est le symptôme d’une société adolescente, fascinée par l’immédiateté. En baisant, on tente de vaincre les angoisses de la condition humaine

N. O. – Vous prédisez un avenir bien sombre…
D. Folscheid. – Avant de sortir de la crise, on risque de voir apparaître un néopuritanisme forcené, tourné contre la sexualité en général. On en perçoit çà et là des prémices, avec des débordements sectaires dans le monde anglo-saxon (par exemple, l’engagement dans certains groupes de ne plus faire d’enfants…). Rien ne dit qu’une partie non négligeable de la population ne refuse pas aujourd’hui la sexualité, tout en se taisant, par peur d’apparaître anormale ou ringarde. Certains mouvements conservateurs peuvent ainsi tirer leur épingle du jeu, comme ces groupes islamistes dont l’audience est croissante dans certaines banlieues. Ni alcool ni sexe, et le voile pour les filles… Bref, on fait de la casse, avec des malheureux dans la vie et de nouveaux clients pour les psys.

Dominique Folscheid est professeur de philosophie à l’université de Marne-la-Vallée. Il a notamment publié «Philosophie, éthique et droit de la médecine», PUF, 1997, et «Sexe mécanique. La crise contemporaine de la sexualité», La Table ronde, 2002.

Le nouvel observateur - jeudi 24 juillet 2003

Mardi 18 janvier 2 18 /01 /Jan 00:00

Un peu trop clinique mais bon c'est une bonne justification

Avoir des rapports sexuels deux à trois fois par semaine renforce les défenses immunitaires, au moins celles des hommes, selon une étude. La concentration des cellules dites "tueuses" dans le sang double juste après l'orgasme.

Ces résultats ont été rapportés par Tillmann Krüger de l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) dans l'édition de février de la revue "Psychologie heute" (La psychologie aujourd'hui). Selon M. Krüger, le sexe a une vocation préventive car à chaque rapport, le corps entre en contact avec un grand nombre de germes étrangers qui renforcent les défenses immunitaires.

Le chercheur renvoie en outre à une étude américaine menée sur le long terme selon laquelle des rapports deux ou trois fois par semaine augmentent la concentration d'anticorps dans la salive. En revanche, "nettement plus ou moins de sexe réduit la quantité d'anticorps", précise le médecin.

ATS, le 18 janvier 2005 à 15:36 _ WEINHEIM

Mercredi 12 janvier 3 12 /01 /Jan 00:00

L'article est long je sais mais instructif pour ceux qui ne l'aurait pas lu cette été. Allez bonne lecture

bisous a tous

La danse sur le dernier Kylie Minogue. Ça mate, ça clope et ça carbure au whisky coke. Ambiance de soirée étudiante avec quelques parents grisonnants égarés au bar. Les conversations glissent: études, boulot, projets de vacances… Mais la voisine doucement s’impatiente: «Allez ma puce, dit-elle d’une voix de miel, on va s’occuper de toi.» Elle est ronde, et blonde. Débardeur, bottes en cuir, jupe ultracourte à même la peau. Elle s’appelle Emmanuelle et vous dévisage de ses grands yeux noirs. 20ans à tout casser. Le copain l’enlace tendrement. «J’adore. Elle est complètement épanouie depuis que je l’ai amenée ici.» Ici, à l’Overside, ils retrouvent leurs amis, Isabelle et Dan, boulangers à Aubervilliers, Marc, le photographe, et sa dernière conquête, une liane aux cheveux bruns, étudiante en droit. Ensemble, et avec d’autres, ils vont «s’éclater» au fond du couloir, dans les coins câlins. Baisers, caresses et… plus si affinités. Ça ne change rien à leur amour, au contraire, ça l’a renforcé, disent-ils: «C’est fini, on ne vit plus comme nos parents. Nous, on est mariés, mais pas question de baiser pendant quarante ans avec la même personne. Il faut vivre avec son temps.»


Et l’époque commande du sexe, toujours plus, plus ludique, plus exotique, plus extatique.Sans tabous, sans limites, rien que du plaisir. C’est le refrain du moment partout, pub, télé, radio, cinéma, littérature… Houellebecq et les cercles branchés de «Nova Mag» ou de «Paris dernière» ne sont plus les seuls à vanter les mérites de la partouze… Même aux «Z’Amours», le «Tournez manège» moderne de France 2, on se demande si «on l’a déjà fait à plusieurs?», «rien qu’entre femmes?», et «qu’est-ce que ça fait?». Sur internet, des milliers de sites, d’associations, de forums détaillent les mille et une façons de faire exploser sa libido. La France entière, jusque dans les cours d’école ne parle plus que de ça, «triolisme, échangisme, gang bang. A quatre pattes, par devant, par derrière…». Simples provocs de langage? Suite, après la parenthèse noire des années sida, du «jouissons sans entrave» de Mai-68? Symptôme d’une société minée par la peur de vieillir? Comment expliquer ce nouveau vent apparent de liberté sexuelle? Qui le porte? Et qui en profite réellement?
Les adeptes de l’échangisme, du mélangisme, du SM, les «nouveaux libertins», comme ils aiment qu’on les appelle, sont désormais des gens de tous âges et de tous milieux, ingénieurs, RMIstes, et même ministres (voir encadré), profs, employés, ouvriers… «Il y a une véritable démocratisation de ces pratiques, qui doivent aujourd’hui concerner plus de 400000personnes dans toute la France, indique le sociologue Daniel Welzer-Lang, professeur à l’université de Toulouse-le-Mirail. Beaucoup de gens y viennent par curiosité. Ils se disent qu’il faut au moins essayer, tenter une relation à plusieurs ou une expérience homo. Les relations bisexuelles ont ainsi, par exemple, beaucoup augmenté.» Isabelle Million a fondé en 1994 Couples contre le Sida, une association qui s’occupe de prévention dans les clubs échangistes et, l’été, sur les plages bondées du Cap-d’Agde. «Le milieu s’est considérablement renouvelé. Nous voyons aujourd’hui de jeunes gens qui n’ont parfois que 18 ou 20ans.» Les anciens comme Roger, instituteur à Vannes, s’y perdent: «Les femmes se lâchent complètement. Et maintenant on a aussi des gamins. Eux, ils sont souvent voyeuristes ou exhibitionnistes. Il y a trente ans, c’était moins compliqué!» Traduisez plus fraternel, plus «peace and love» sans doute, mais aussi plus caché. Fini aujourd’hui les petites annonces en langage codé: dans «Swing», les textes sont illustrés, madame fesses en l’air, monsieur en action. Et on s’échange parfois sur internet les gags de la dernière «touze entre amis», photos numériques à l’appui. Echangiste, ça n’est plus vraiment transgressif. Témoignage d’un organisateur de soirées: «C’est banal, comme le devient peu à peu le SM.» On en parle facilement, on en est souvent fier, parfois indifférent. Conception, 37ans, vingt ans de mariage et quatre enfants, habite près de Rouen. «Voilà, on faisait une soirée entre amis, on avait un peu picolé. Et on s’est dit soudain: "Tiens, si on faisait une partouze." On en avait tellement entendu parler dans les films, à la télé.» Elle hausse les épaules: «Voilà. Rien d’original. On voulait élargir la vie sexuelle. Et puis, comme on dit, il n’y a pas de mal à se faire du bien.» De nombreux échangistes racontent qu’ils se sont lancés, comme ça, presque par hasard. Mais, en fait, la décision a souvent été longuement mûrie. Les femmes ont, pour la plupart, mis du temps avant d’accepter un fantasme, qui reste encore essentiellement masculin. Patricia, employée dans une maison de retraite, a longtemps résisté. Faire l’amour à plusieurs? Impensable quand on a été élevée chez les sœurs et mariée à 19ans. Et l’approche de la quarantaine l’a fait méditer: «Je me suis dit: "Merde, je vieillis, il ne faudrait pas passer à côté de certaines choses." J’ai essayé. Fabuleux, ma vie a complètement changé.»


Chacun son histoire, et sa formule: soirées en club ou buffet campagnard à domicile, deux fois par semaine ou deux fois par an, triolisme, échangisme, mélangisme, à tendance SM ou fétichiste… Mais les mêmes expressions reviennent, comme une leçon apprise par cœur. «Faut pas mourir idiot.» C’est comme une «cerise sur le gâteau», qui vient «briser la routine», mettre du «piment dans le couple». Ceux-là ont trouvé leur solution au grand dilemme de l’Homme moderne, «le besoin de se ressourcer dans un cocon et de vivre sans cesse de nouvelles sensations» (voir l’entretien avec Willy Pasini). Et l’amour dans tout ça? «Rien à voir avec le sexe», répètent-ils. Eux, ils s’aiment et, croyez-les, bien plus que ceux qui mènent une double vie. Eux, ils s’aiment et, croyez-les, bien plus encore depuis qu’ils partagent ces petites gâteries. «Je regarde aujourd’hui mon épouse comme je ne le faisais plus depuis longtemps, s’étonne Pierre, un chauffeur de taxi marié depuis vingt ans. Il m’arrive même de me réveiller la nuit pour lui caresser les cheveux.» Claire, 26ans, infirmière: «Ça a complètement sauvé notre couple. On s’est redécouvert. On a retrouvé du désir l’un pour l’autre.» Et le plaisir ultime, tous, hommes et femmes, le disent, c’est de se retrouver dans le lit conjugal après une belle partie de jambes en l’air. Revanche de la vie simple sur les grands frissons. Jacques, un gaillard du BTP, rencontré un soir dans l’un des plus anciens clubs échangistes de Paris: «On est là seulement pour jouir les uns des autres. Tout ça, c’est rien. Seulement un jeu.»
Une minorité joue à se faire plaisir en bravant les conventions et les interdits. Quoi de plus légitime finalement. Certes, mais au temps de l’individualisme triomphant, à l’heure où chacun cherche à se différencier, ces comportements risquent de devenir une tendance, une mode et peut-être même une norme.A force d’en parler, de les valoriser, ils pourraient bien influer de manière insidieuse sur nos vies.Pour le philosophe Dominique Folscheid (voir entretien), « ils ont déjà contribué à complètement bouleverser l’imaginaire amoureux de l’époque ». Ils viennent encore renforcer le discours ambiant du «tout faire, tout essayer». L’idée qu’une vie réussie passe obligatoirement par une sexualité de folie. Qu’il faut coûte que coûte entretenir le désir, satisfaire ses fantasmes et jouir, jouir jusqu’à 80ans. Selon Philippe Brenot, directeur d’enseignement en sexologie à l’université Paris-V, «ce vent de liberté culpabilise une bonne partie des gens. La banalisation dans le langage des pratiques échangistes, SM, du porno crée de nouvelles normes». Le sexologue Jacques Waynberg va plus loin: «La moindre défaillance du désir est devenue suspecte. Les couples passent leur temps à faire un audit sur la qualité de leur vie sexuelle. Le smic traditionnel: un ou deux rapports par semaine de sept minutes et demie n’est plus acceptable. Tant mieux, à condition de ne pas sombrer dans l’angoisse et l’obsession.»


Dans le secret de leur cabinet, les spécialistes sont confrontés désormais à d’étranges questions: «Trois fois par mois, c’est grave docteur?» «Je n’ai pas un orgasme à chaque fois…» «Je n’ai pas envie d’essayer l’amour à plusieurs, c’est normal?» Ces patients-là ignorent que d’autres demandent de l’aide parce qu’à 40ans déjà ils n’ont plus jamais envie, ou parce qu’à 25 ils ont peur de faire l’amour. Non, tout le monde n’a pas la vie sexuelle de Catherine Millet. Mais personne n’ose le dire. Les fantasmes de l’époque exercent une pression insoupçonnable. C’est le thème de «Sept Ans de mariage», le dernier film de Didier Bourdon, sauvé par Catherine Frot, excellente en grande bourgeoise coincée. Son mari, médecin, décide de tout lui infliger – films pornos, sex-shop et boîtes échangistes – pour réveiller sa libido… Ce mauvais scénario se produit aussi, parfois, dans la vraie vie. Alexandra, 21ans, est serveuse dans un restaurant près d’Amiens. Son copain, éducateur, a récemment vu le documentaire de Daniel Karlin, «Et si on parlait d’amour», qui aurait pu s’intituler «Et si on parlait d’échangisme»… Un soir, il lui a confié que lui aussi aimerait bien essayer: «Tu sais, ça se fait maintenant.» Elle a fini par se laisser entraîner. «J’ai juste accepté de me faire caresser, pour lui. C’est vraiment pas mon truc, mais je crois que je ne vais pas pouvoir y couper…» Sur les forums de discussion, des internautes s’interrogent: «Avez-vous déjà eu une expérience à plusieurs? Mon mec le demande? Qu’est-ce que je dois faire?» «Les femmes seront les grandes perdantes, s’inquiète le psychiatre Philippe Brenot. Elles vont croire qu’il faut en passer par là pour ne pas perdre leur compagnon, comme elles se sentent aujourd’hui obligées d’accepter la fellation ou la sodomie.»
Mais la pression ne vient plus seulement des hommes. Nathalie a la trentaine, deux enfants, un poste de direction dans un hôpital. Une vie heureuse mais un peu morne, un désir qui s’émousse: «Je commençais à regarder autour de moi pour la première fois après dix ans de mariage.» L’échangisme, dont lui avait parlé un ami, lui a paru soudain moins impensable. Elle a convaincu son mari d’aller dans un club «comme ça, par curiosité». Lui qui n’avait jamais fumé a vidé la moitié d’un paquet de cigarettes. Et il n’a jamais pu lui faire l’amour.
Beaucoup de couples reviennent emballés de ces expériences, mais d’autres se perdent. Jalousie, traumatisme de voir l’autre dans des bras inconnus, crainte de ne plus être aimé ou de ne plus savoir aimer… «Il faut avoir une grande maturité affective et érotique pour aller dans ce genre d’endroits», prévient le sexologue Jacques Waynberg. «Surtout, ne pas s’y aventurer pour sauver son couple.» Julien, 24ans, un visage d’enfant sous des airs de play-boy, a goûté aux clubs échangistes entraîné par son directeur de stage. Ses copains de fac l’écoutaient, verts de jalousie, raconter ses aventures. Et puis Julien est tombé amoureux. Au bout de six mois, il a voulu initier sa copine. Leur histoire s’est aussitôt terminée. «Je n’ai pas supporté de la voir prendre son pied avec un autre.» Julien ne sait pas s’il pourra, un jour, nouer une relation stable. «Je me lasse très vite. Je n’arrive plus à rester six mois avec une même nana. J’ai peur.» Il réalisera sans doute un jour que la routine n’épargne personne, même les plus grands libertins. Martine, kiné dans la région d’Aix-en-Provence, a donné dans l’échangisme pendant dix ans avec son mari, prof d’art dramatique. Elle s’est convertie au départ pour lui et s’y est beaucoup plu: de belles rencontres, des fêtes, le plaisir d’être constamment convoitée… Mais, aujourd’hui, la jeune femme est lasse: «J’ai l’impression qu’on m’a lâchée dans une pâtisserie alors que je n’avais pas spécialement faim. J’ai mangé tous les gâteaux et je suis écœurée. Maintenant, j’ai simplement besoin d’amour.»


Sophie des Deserts

Semaine du jeudi 24 juillet 2003 - n°2020 - Le Nouvel Observateur

Lundi 10 janvier 1 10 /01 /Jan 00:00

Je sais c'est long mais c'est pas trop mal, même si un peu cérébral, lol !!

Les discussions via le Net constituent une vraie révolution relationnelle et professionnelle.
Les «chats», nouveaux jeux de l'amour et du hasard

Décidément, les grandes réussites sociales, dans le domaine des technologies de communication (ou TIC), se trouvent souvent là où on ne les attendait pas. Après le déconcertant succès des SMS, voici que le «chat» ­ ou conversation synchronisée par l'Internet ­ s'impose à son tour comme un véritable phénomène de société. Car ils sont des millions à emprunter chaque jour ces chemins de traverse électroniques qui serpentent parallèlement aux très embouteillées autoroutes de l'information. En chattant, on s'amuse et on «délire», on «tue le temps» (au bureau si possible), on échange sur des thématiques affinitaires et, surtout, on drague ! L'Internet n'est-il pas en train de s'imposer comme le premier vecteur d'adultère de ce début de siècle ?

Le chat (ou dial), c'est donc de la conversation électronique en temps réel, parfois assistée d'une webcam, avec une (ou des) personne (s) à qui l'on choisit d'écrire et de répondre. Les forums de discussions (pour le dire en français) sont d'invraisemblables melting-pots sociaux qui offrent une réalité à l'évanescente convivialité numérique. Et pour cause, on sait à tout moment «qui est là» (via une liste d'«amis»), si notre message a été lu, qui nous écrit... Paradoxe : sur les chatting forums, les rapports se nouent de manière personnalisée, alors que l'anonymat est de mise (pseudo oblige), et que les corps sont absents. Quel paradoxe que ces «relations flashs», denses et furtives, entre des «inconnus intimes»...

Pesons nos mots : le chat constitue une véritable révolution relationnelle, et professionnelle aussi. Car il faudrait oser chiffrer ce qu'il coûte aux entreprises et administrations. Profitant des après-midi oisives, et surtout de l'absence du supérieur, des dizaines de milliers de personnes chattent au lieu de travailler. On comprend que cette habitude «chronophage» et transgressive puisse vite prendre le pas sur les obligations professionnelles et des utilisations plus mornes et conventionnelles de l'ordinateur. Mais des parades techniques (des filtres) et des jurisprudences enrayent désormais ce fléau économique. Et gare aux passe-murailles du Net, pris la main sur le clavier défendu, jouant au chat et à la souris sur le petit tapis...

Chattant, on a l'impression à peine métaphorique d'être sur une place publique, ou dans un immense cocktail. Le chat, c'est le «bistrot du Net» (H. Rheingold) ! Là, on peut à sa guise «tenir salon», papillonner, ou privilégier l'aparté en tête-à-tête. Bien sûr, des modérateurs ­ les videurs du Net ­ veillent au respect de l'indispensable «netiquette», mais les chatting forums sont des espaces de libre expression, dont certains usent, voire abusent.

De prime abord, le chatting pourrait être considéré d'une pauvreté intrinsèque, et donc d'un attrait limité, pour des internautes maintenant habitués au luxe d'univers multimédias aux qualités graphique et sonore exceptionnelles. Ne se résume-t-il pas à des échanges courts, symétriques, finalement télégraphiques ? Mais le chatting est un jeu, et son succès est sans doute à chercher dans sa nature ludique.

D'abord jeu avec soi-même, et l'idée intuitive que l'on se fait du destin. Les plates-formes de chatting des sites de rencontres pour célibataires, par exemple, constituent d'immenses «loteries relationnelles». On y vient sans savoir qui l'on va y rencontrer. Le hasard ­ et peut-être le destin ­ est au coin de l'écran, à portée de clic. Beaucoup de «solos» y viennent et y reviennent sans cesse, comme le joueur de Dostoïevski à sa table, car ils pensent que «la chance va tourner», que dans quelques minutes leur vie peut changer.

Mais jeu avec l'autre, aussi, car souvent on ne le connaît pas, et chatter s'apparente en ce sens à un véritable poker, parfois menteur. Un petit tour d'horizon pour savoir «qui est là», un oeil jeté aux fiches «en ligne», et quelques courts messages envoyés pour commencer, comme des bouteilles à la mer. Ensuite, l'attente, longue, ou très courte, les «jours de chance». On provoque, on suggère, on propose, on induit dans des discours, qui peuvent être des registres de la «bonne blague», de la confidence, de la séduction, voire de l'érotisme caractérisé.

Le caractère ludique des échanges en chat tient à son rythme frénétique, quand «la greffe a pris». Alors s'instaure parfois un dialogue en simultané de plus en plus rapide, véritable «ping-pong» verbal et numérique qui induit une tension nerveuse et même physique chez ses protagonistes. Manier les degrés, mettre le maximum de sens dans un minimum de mots, détourner les codes pour les réinvestir, réagir vite et bien ; «rebondir» à bon escient. Et toujours, garder à l'échange un rythme haletant, garant du plaisir.

Le chat devient alors une pratique qui absorbe, fascine et sidère, faisant oublier les rendez-vous, la faim et le sommeil. Et nombre de chatteurs parlent presque exaltés de ce crescendo frénétique saisissant des inconnus qui «s'emballent» soudain à partir de quelques mots échangés. Alors, le caractère désinhibant du Net permet de contourner civilités et convenances, pour emprunter des raccourcis relationnels (d)étonnants, vers les voies de la confidence, d'un marivaudage assumé, sous forme de jeu, toujours. Et prendre un «râteau» ménage les orgueils, quand il est numérique !

Le jeu continue dans ce maniement des degrés, de l'implicite et de l'explicite, dans le détournement des codes orthographiques et typographiques (grâce aux smileys). Et grâce à un ensemble de gimmicks verbaux composant un sabir «jeuniste», fait d'abréviations et d'une improbable adultération digitalo-alphabétique. Les codes traditionnels sont piratés pour servir de nouvelles formes d'oralité, produisant un «parlécrit» pétri d'interjections, de majuscules (pour crier ou s'esclaffer)... Et l'exigence est de faire court et vite, surtout. Aller à l'essentiel, au prix d'un étonnant exercice, qui exige maîtrise technique et fulgurance rhétorique.

Enfin, le chat est un jeu avec la «machine». Car les «ordinateurs chattant» sont les vecteurs dynamiques d'un code graphique d'alerte ­ donc d'attention permanente ­, qui, au gré des messages envoyés, lus et reçus, s'allument, clignotent, sous forme d'enveloppes lumineuses, de smileys complices. Et tous à leur manière appellent à jouer encore, comme ces flippers de bistrots qui susurraient, jadis, de leurs voix mécaniques, «play again»... «Bien chatter» exige de connaître parfaitement son ordinateur pour aller vite, passant des un (e) s aux autres simultanément, et ne rien perdre du plaisir et des contacts. Une rage folle saisit d'ailleurs les chatteurs confrontés à une panne de réseau ou à un «plantage», car cette irruption du «réel» est aussi insupportable que douloureuse.

Entérinant l'ère du flirt numérique et du détournement de l'Internet en contexte professionnel, le chat reste une pratique superficielle et amnésique. Les messages n'y sont en principe pas archivés et chacun efface les précédents. C'est un palimpseste technologique gommé chaque heure, et chaque heure réécrit. Mais ces forums permettent à des internautes de se découvrir et de se rencontrer parfois, de l'autre côté du miroir sans fond de l'écran. Il s'agit d'un mode relationnel léger et spontané, paradis des casaniers et des insomniaques ; symptomatique aussi de cette idéologie de la communication dans laquelle nous baignons, et qui exige que nous soyons connectés le plus souvent, et le plus longtemps possible ; quitte à verser dans la «cyber-addiction» ou le «zapping relationnel».

Questions d'actualité : chatter et marivauder sur le réseau avec des inconnu(e)s, est-ce tromper? C'est déjà assurément tromper l'ennui. Et les forums sont-ils des non-lieux troubles et piégeux attirant pervers et pédophiles, et à ce titre, nouveau repoussoir des conservateurs et autres technophobes ? On y vient anonyme et en connaissance de cause, tout le monde ­ et surtout les ados ­ sait intuitivement que c'est le «royaume des petits mensonges entre amis» et de la «schizophrénie numérique». Et c'est librement, aussi, qu'on choisit de donner son téléphone, pour passer «dans la vraie vie».

A l'ère de la distanciation généralisée des rapports, le chat constitue un «hygiaphone technologique» ludique et libidineux, «tout à l'ego» servant de déversoir aux «solitudes interactives». Ceux qu'on y croise n'ont ni corps ni âge, mais un sexe assurément... Qu'on se le dise : sur le Net aérien, dotés de plumes (numériques) affûtées et momentanément désincarnés, les chatteurs ne sont pas des anges pour autant !

Pascal LARDELLIER professeur à l'université de Bourgogne.

Liberation - mercredi 29 décembre 2004

Samedi 8 janvier 6 08 /01 /Jan 00:00
 L'éducation sexuelle en panne

Ultime soirée de l'année consacrée au combat d'hier pour la légalisation de l'avortement, à la loi Veil et à la situation aujourd'hui[ARTE, Soirée thema «Education sexuelle : une réalité européenne ?»] . Les deux premiers documentaires remplissent leur cahier des charges en brossant les tableaux des situations contrastées en Europe. Le troisième, hélas trop bref, tente une percée intéressante vers l'un des aspects les moins médiatiques de l'affaire : l'éducation sexuelle des adolescents.

Les militants d'hier le savent bien, si l'on veut que le nombre d'IVG diminue, pas de secrets, il faut une réelle, efficace, constante information sur la contraception. D'autant que si le préservatif est certes connu, c'est au détriment des autres moyens de contraception. En France, les chiffres (IVG et maladies sexuellement transmissibles chez les ados) nous disent chaque année ce que coûte l'absence de politique d'information. Qu'en est-il dans les pays européens ? Il y a du bon : l'Allemagne où la sexualité est abordée dans les cours d'éthique, les Pays-Bas où des profs sont formés à l'éducation sexuelle (trois à quatre cours par an, mais les crédits gouvernementaux sont en baisse cette année). Et du moins bon, comme la Pologne où l'énoncé seul des cours de «préparation à la vie familiale» dit bien le poids encore énorme de l'Eglise dans cette affaire. Une Fondation des femmes pour le planning familial existe à Varsovie, qui distribue des prospectus, mais pas de pilule : 7 euros par mois, un luxe dans ce pays où le salaire moyen est de 500 euros. Ce tour des politiques d'information est bien trop incomplet pour que le spectateur puisse se faire une idée des réalités. Emerge tout de même une évidence : à l'exception des Pays-Bas, aucun pays ne mène une politique d'information volontariste, ouverte, offensive à destination des adolescents.

Par Sophie ROSTAIN 

Liberation - mardi 14 décembre 2004

Samedi 8 janvier 6 08 /01 /Jan 00:00

Avec du retard mais cela reste un incontournable: Technikart

Avec son numéro deja ancien:  La bite génération On en parle de plus en plus, on la montre, on se la fait grossir... La poitrine ? Non, la bite. Et si c'était ça la vraie révolution sexuelle : TECHNIKART N°88 DECEMBRE !!

Voici le lien vers le site pour ceux qui n'en aurait jamais entendu parler. www.technikart.com

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